Le terroriste Radouane Lakdim qui a tué, le 23 mars, quatre personnes, dont le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, lors d’attaques à Trèbes et à Carcassonne (Aude) était un individu fiché S par les services de police et de l’antiterrorisme. Cette particularité a relancé la polémique sur le traitement à accorder aux individus surveillés.

Deux points de vue s’opposent sur la question : l’ancien député (PS) Sébastien Pietrasanta considère que légiférer serait un contresens dans la lutte contre le terrorisme, alors que le professeur de droit, Christian Vallar propose de s’inspirer de la loi du 5 juillet 2011 sur les soins psychiatriques sans consentement – qui permet aux autorités administratives d’hospitaliser des personnes sans leur accord, pour des motifs en particulier d’ordre public –, à condition de respecter les principes juridiques de la République.

Christian Vallar : « La loi sur les soins psychiatriques sans consentement de 2011 peut être la référence ». Le professeur de droit rappelle que voter une loi contre les personnes faisant l’objet d’une fiche S doit respecter l’ensemble des conditions juridiques et techniques, ainsi que les principes républicains.

Sébastien Pietrasanta : « La rétention est un contresens en matière de lutte contre le terrorisme ». L’ancien député socialiste et rapporteur de la commission d’enquête sur les attentats estime que placer un individu fiché S en détention administrative ou l’assigner équivaut à le prévenir qu’il est surveillé.

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Qu’est-ce qu’une « fiche S » ?, par Jérémie Baruch et Pierre Breteau. Les membres identifiés de l’attaque contre le Bataclan faisaient tous l’objet d’une signalisation d’atteinte à la sûreté de l’Etat, comme 20 000 personnes en France.

Ce que contient le plan pour identifier et prendre en charge la radicalisation, par Jean-Baptiste Jacquin. Education, justice et recherche font partie des secteurs mobilisés dans le plan, baptisé « Prévenir pour protéger » (lien PDF), dévoilé le 23 février par le premier ministre.

L’internement des fichés « S », un débat récurrent mais une mesure impossible, par Julia Pascual. Le Conseil d’Etat a estimé fin 2015 que « nul ne peut être détenu arbitrairement ».

« La quête de vengeance est consubstantielle à l’ensemble du djihadisme contemporain », par Myriam Benraad (Professeure associée en science politique à l’université de Leyde, Pays-Bas). L’universitaire explique que la vengeance permet aux terroristes de justifier leurs actes et de se fabriquer un ennemi. Un discours qu’il faut donc déconstruire.