Des femmes pleurent la mort d’un manifestant tué par l’armée israélienne, lors de funérailles à Khan Yunis, dans la bande de Gaza, samedi 31 mars. / Wissam Nassar / Wissam Nassar/dpa

Des milliers de Gazaouis se sont rendus samedi 31 mars aux funérailles de manifestants tués la veille par l’armée israélienne. Vendredi, 16 Palestiniens ont été tués lors d’un mouvement de protestation le long de la barrière frontalière qui sépare la bande de Gaza d’Israël.

Malgré la colère qui monte depuis vendredi, journée la plus meurtrière depuis la guerre de 2014, seuls quelques centaines de manifestants sont retournés samedi après-midi sur plusieurs zones près de la frontière entre Gaza et Israël pour poursuivre « la marche du retour ».

Selon le ministère de la santé de la bande de Gaza, 15 personnes ont été blessées samedi lors de heurts le long de la frontière.

Ce mouvement de protestation est appelé à durer jusqu’au 15 mai, jour de la Nakba (la grande « catastrophe » que fut l’expulsion de centaines de milliers de Palestiniens lors de la création de l’Etat d’Israël). Pendant six semaines, il prévoit des rassemblements le long de la barrière de sécurité pour exiger le « droit au retour » des réfugiés palestiniens et dénoncer le strict blocus imposé par Israël à Gaza.

Grève générale

Dans plusieurs villes de la bande de Gaza, une foule compacte a accompagné les cercueils de manifestants tués la veille. « Arabes, musulmans, où êtes-vous ? », ont scandé les participants, certains brandissant des drapeaux palestiniens ou appelant à la « vengeance ».

Une grève générale est également en cours dans l’enclave — « au bord de l’effondrement » selon l’ONU — ainsi qu’en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis plus de cinquante ans.

Une quinzaine de Palestiniens ont été blessées samedi lors d’affrontements le long de la frontière entre la bande de Gaza et Israël. / Khalil Hamra / AP

Des affrontements entre Palestiniens et forces israéliennes ont éclaté samedi à Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, tandis qu’une petite manifestation a eu lieu à Naplouse, plus au nord.

La tension est vive depuis vendredi, lorsque l’armée israélienne a ouvert le feu sur des Palestiniens qui s’étaient approchés à quelques centaines de mètres de la barrière ultra-sécurisée séparant l’Etat hébreu de la bande de Gaza, régulièrement le théâtre de heurts sanglants.

Selon le ministère de la santé à Gaza, 16 Palestiniens ont été tués et plus de 1 400 blessés, dont 758 par des tirs à balles réelles. Aucun mort ni blessé n’ont été signalés côté israélien. Le président palestinien Mahmoud Abbas a décrété samedi jour de deuil national et tenu Israël pour seul responsable des morts.

Des Palestiniens se cachent des snipers israéliens slors d’affrontements à la frontière sud de la bande de Gaza, samedi 31 mars. / IBRAHEEM ABU MUSTAFA / REUTERS

L’armée a affirmé avoir tiré par nécessité contre les manifestants qui lançaient des pierres et des cocktails Molotov sur les soldats. Selon elle, certains ont également tenté d’endommager la clôture et de s’infiltrer sur le territoire israélien.

L’ONU réclame une « enquête indépendante »

Mais selon les organisateurs de la manifestation, les Palestiniens ont été touchés alors qu’ils ne représentaient pas de menace immédiate. Ils pointent du doigt l’usage disproportionné de la force par Israël et des organisations de défense des droits de l’homme s’interrogent sur ces tirs à balles réelles.

« Les allégations israéliennes de violences par certains manifestants ne changent rien au fait que l’utilisation de la force meurtrière est interdite par le droit international, sauf pour faire face à une menace imminente », a affirmé l’ONG Human Rights Watch, jugeant le nombre de morts et de blessés « choquant ».

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, ainsi que la représentante de la diplomatie européenne Federica Mogherini ont pour leur part réclamé une « enquête indépendante ».

Les Etats-Unis, régulièrement accusés ces derniers mois de parti pris pro-israélien, se sont dits « profondément attristés par les pertes humaines à Gaza », appelant à « des mesures pour faire diminuer les tensions ».