Assemblée générale de l'intersyndicale des cheminots de Paris-Nord au premier jour de grève nationale des cheminots contre le projet de réforme de la SNCF, mardi 3 avril. / Jean-Claude Coutausse/French-politics pour Le Monde

Le bras de fer continue entre gouvernement et cheminots, et personne ne semble vouloir lâcher d’un pouce. Au deuxième jour de grève à la SNCF, mercredi 4 avril, après une première journée particulièrement suivie, le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux a annoncé que la réforme de l’entreprise ferroviaire serait menée « jusqu’au bout, avec une grande détermination ».

« Cette mobilisation ne doit pas empêcher le gouvernement d’avancer et de conduire les transformations pour lesquelles nous avons été élus il y a un peu moins d’un an », a recommandé le président, Emmanuel Macron, à son équipe gouvernementale, au cours du conseil des ministres mercredi matin.

En parallèle, la mobilisation reste forte chez les cheminots. Si le taux de grévistes dans l’ensemble de l’entreprise était en baisse mercredi par rapport à la veille, selon la direction – 29,7 % contre 33,9 % –, il restait très important chez les « agents indispensables à la circulation des trains ». C’est le cas chez les conducteurs (74 % mercredi contre 77 % mardi) et ces niveaux étaient même en hausse pour les contrôleurs (77 % contre 69 %) et les aiguilleurs (46 % contre 39 %). Dans la matinée, près de 300 assemblées générales étaient aussi organisées à travers le pays pour discuter de la suite du mouvement.

Grève reconductible ou grève perlée

Car si les syndicats dénoncent à l’unisson le projet de réforme du gouvernement, le débat est vif, parmi les cheminots, sur les modalités à adopter pour la suite du mouvement. Doivent-ils poursuivre leur « grève perlée » de deux jours sur cinq, comme le souhaitent la CGT, l’UNSA et la CFDT ? Ou s’engager dans une grève reconductible au jour le jour, comme le martèle SUD-Rail ?

En fin de matinée, au bout du quai 36 de la gare du Nord, à Paris, l’assemblée générale de l’intersyndicale a décidé à une courte majorité (27 votants contre 26), après une heure de discussions, que la grève serait reconduite le 8 avril, et non le 5.

Fabien, employé à la maintenance des TGV et syndiqué chez SUD-Rail, fait partie de ceux qui souhaitent une « grève générale, tous les jours » pour faire plier le gouvernement. « Il faut bloquer l’économie du pays », assume-t-il. A la SNCF depuis dix-sept ans, il a le sentiment que les cheminots sont « extrêmement motivés » :

« Pour l’instant il y a une petite étincelle, mais il faut tout faire pour que ça prenne, pour que les étudiants nous rejoignent. »

Selon lui, la réforme gouvernementale passe à côté de la question centrale : la dette de l’entreprise ferroviaire.

« On n’en parle pas du tout alors que c’est la question centrale. Elle a été générée par le tout TGV voulu par les politiques ces dernières années. »

« Garde-fous »

David, 31 ans et conducteur de train depuis huit ans, souhaite lui aussi une grève reconductible pour s’opposer à ce qu’il qualifie d’« attaque sans précédent » contre la SNCF. « Il faut être à la hauteur de cette attaque. Avec ce projet, on revient au XIXe siècle », dit-il. Il a mis « un mois et demi de salaire de côté » pour tenir, le temps d’une grève longue. « Si on ne se bat pas là, on n’aura plus qu’à aller pointer à Pôle emploi », estime aussi Yazid, conducteur.

Pour d’autres cheminots en revanche, les conditions ne sont pas encore réunies pour une grève reconductible au jour le jour. « Ça va être un long combat, il faut que les salariés tiennent », explique Luis Da Silva, secrétaire général de la CGT.

« On est parti sur une course de fond contre le gouvernement, pas un sprint. »

Au-delà des modalités du mouvement, les grévistes réunis gare de Lyon estiment que si Emmanuel Macron l’emporte face aux cheminots, le président aura alors le champ libre pour faire passer d’autres réformes libérales. « On est les derniers garde-fous, estime Fabien. Macron s’attaque aux cheminots alors que ce n’était pas dans son programme. S’il nous fait plier, ça sera ensuite plus facile pour lui de faire passer ses réformes. C’est aussi pour cela qu’on reçoit des messages de soutien de la part des Français. »

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