« Onze nations ont ratifié le 8 mars au Chili l’un des accords de libre-échange les plus exhaustifs à ce jour, l’Accord de parte­nariat transpacifique global et progressiste (PTPGP) ». (Photo : Après la signature qui ratifiait le TPTGP – Comprehensive and Progressive Agreement for Trans-Pacific Partnership (CP TPP) –, à Santiago du Chili, jeudi 8 mars. / Esteban Felix / AP

Tribune. Confrontées au spectre d’une nouvelle guerre commerciale et à celui du protectionnisme populiste à l’œuvre dans certaines parties du monde, onze nations ont ratifié le 8 mars au Chili l’un des accords de libre-échange les plus exhaustifs à ce jour, l’Accord de parte­nariat transpacifique global et progressiste (PTPGP).

Aujourd’hui, ce message est plus important que jamais. Nos deux pays, l’Australie et le Canada, signataires de cet accord, partagent un patrimoine commun, des ­principes démocratiques libéraux, une vision commune et une confiance dans la force écono­mique du commerce mondial. Un commerce ouvert et libéral a contribué à bâtir des communautés prospères en Australie et au Canada, en leur offrant plus de possibilités que dans toute l’histoire de l’humanité, en améliorant leur niveau de vie et en donnant naissance à deux des nations les plus riches au monde.

A travers le monde, des échanges plus ouverts et plus libres ont sorti environ un milliard de personnes de l’extrême pauvreté

Quoi qu’ils ne soient pas immédiatement perceptibles, les avantages du commerce entre nos deux nations sont clairs. Les investissements bilatéraux dépassent 80 milliards de dollars canadiens [environ 50,4 milliards d’eu­ros]. Que vous vous rendiez au ­travail dans un train canadien à Brisbane, ou que vous soyez un Canadien ou une Canadienne employé par une entreprise australienne à Montréal, c’est une chose qui mérite d’être protégée.

Mais l’histoire du commerce concerne bien plus que nos deux nations. A travers le monde, des échanges plus ouverts et plus libres ont sorti environ un milliard de personnes de l’extrême pauvreté. Pour nous, défendre le ­commerce n’est pas seulement une obligation commerciale ; c’est une décision morale.

Le protectionnisme du passé

Cependant, les défis liés à l’instabilité mondiale, aux changements technologiques rapides et au mécontentement à l’égard des institutions persistent. Quoique les prémices d’un rétablissement économique mondial se fassent aujourd’hui sentir, après des années de croissance au ralenti, certains se sentent encore floués.

La perturbation des vieux secteurs d’activité a incité les gens à chercher une solution facile à leurs déboires économiques

Il n’est pas surprenant que, dans un monde marqué par des ­changements aussi rapides, certaines communautés d’Amérique du Nord et d’Australie se sentent menacées, assiégées, et, dans certains cas, de plus en plus attirées vers le protectionnisme du passé. La perturbation des vieux secteurs d’activité, combinée à la création de nouvelles industries et à de nouvelles façons de travailler, a incité les gens à chercher une solution facile à leurs déboires économiques.

Toutefois, la véritable menace qui plane sur notre relance économique mondiale provient de l’accroissement des mesures commerciales protectionnistes et de la révolte contre un système commercial multilatéral fondé sur des règles. Nous ne pouvons pas faire la sourde oreille aux appels lancés depuis les Etats-Unis, la plus importante économie occidentale au monde, pour retourner à la sombre époque des marchés protégés et des barrières commerciales.

Spirale nuisible

Cependant, nous ne pouvons pas non plus riposter et provoquer une guerre commerciale, car une telle rivalité nous entraînerait rapidement dans l’engrenage de la pauvreté. Il est impératif que le ­Canada, l’Australie et d’autres pays partageant les mêmes vues collaborent pour repousser cette menace contre la libéralisation du commerce mondial et le système fondé sur des règles qui l’appuie depuis si longtemps.

Cette spirale menant à des ­mesures commerciales où l’on se rend coup pour coup et où chacun fait cavalier seul nuirait irrémédiablement à l’économie mondiale, en particulier aux nations de taille moyenne et aux plus petites, qui dépendent en majeure partie du commerce. Le Canada et l’Australie figurent clairement dans cette catégorie. Nous courons un risque réel. Nous avons beaucoup en commun. En tant qu’économies de taille moyenne, le commerce constitue la force vive de nos économies car il génère les revenus élevés auxquels s’attendent nos populations.

Front commun

Le sort de l’économie canadienne est étroitement lié à celui des Etats-Unis, son principal partenaire commercial, tandis que l’Australie dépend largement des marchés d’exportation en Chine et au Japon. Tous ces marchés risquent d’être touchés directement ou indirectement par des mesures protectionnistes.

Certains détracteurs avaient affirmé que le projet n’aboutirait jamais à la suite du retrait des états-Unis du Partenariat transpacifique

Dans ce contexte, on ne saurait exagérer l’importance de la décision prise par le Canada, l’Australie et neuf autres nations de la communauté transpacifique de faire front commun. L’accord du 8 mars éliminera 98 % des tarifs douaniers entre les pays membres et facilitera le commerce et les investissements d’un bout à l’autre de cette région dynamique.

Certains détracteurs avaient affirmé que le projet n’aboutirait jamais à la suite du retrait des Etats-Unis du Partenariat transpacifique, mais un travail acharné et de la persévérance ont prouvé le ­contraire. Les onze pays devraient être félicités pour leur courage et leur résolution à faire profiter leurs populations des avantages d’un marché plus libre.

Le Forum AusCan, qui se tiendra en juillet à Montréal, rassemblera chefs d’entreprise, leadeurs politiques et associatifs afin de renforcer et resserrer les liens entre nos deux démocraties libérales, démontrant ainsi leur engagement commun envers les valeurs qui ont fait prospérer le monde.

Cette tribune a été publiée à l’origine dans « Le Monde » du 29 mars.