A la veille de l’audition devant le Congrès de son patron, Mark Zuckerberg, ici le 27 septembre 2015 au siège de son entreprise, le réseau social poursuit son opération déminage. / Stephen Lam / REUTERS

Facebook continue son opération déminage avant le grand oral de son patron, Mark Zuckerberg, mardi 10 et mercredi 11 avril devant le Congrès américain. Dernière tentative en date, l’annonce d’une commission universitaire « indépendante » chargée d’étudier « les effets des réseaux sociaux sur les élections et la démocratie », selon les termes choisis, lundi 9 avril, par Mark Zuckerberg dans une publication sur sa page Facebook.

Le réseau social est fortement critiqué pour avoir laissé un sous-traitant de Cambridge Analytica — une société spécialisée dans l’influence électorale et chargée un temps de la campagne présidentielle de Donald Trump — aspirer les données personnelles de 87 millions d’utilisateurs de Facebook.

Facebook multiplie les annonces

Cette commission sera composée de plusieurs chercheurs « de points de vue politiques, d’expertise, de genres, d’ethnicités et de nationalités différentes ». Elle sera chargée de définir et de proposer les sujets de recherche — principalement sur l’impact de Facebook sur les élections à venir et sur l’efficacité de ses mesures —, de choisir les chercheurs qui s’y pencheront, et, le cas échéant, de déterminer les données auxquelles ces derniers auront accès, à des conditions de confidentialité que Facebook présente comme très strictes. Ces travaux de recherche seront financés par sept fondations caritatives privées américaines.

Même si les membres de la commission chargée de déterminer les sujets de recherche seront nommés par Facebook — « dans les prochaines semaines » et pour un an — « Facebook n’aura pas le droit de prendre connaissance ou d’approuver le résultat des recherches avant leur publication », assure le réseau social.

Depuis le scandale Cambridge Analytica, Facebook multiplie les interventions publiques. S’il se contente parfois de présenter sous un nouveau jour des mesures déjà annoncées, certaines initiatives, comme cette commission universitaire, sont nouvelles.

L’ingérence : un sujet brûlant

Et elle tombe plutôt bien : les membres du Congrès qui mitrailleront M. Zuckerberg de questions mardi et mercredi ne manqueront pas d’évoquer la question du rôle de Facebook dans les élections. Un sujet plus que brûlant depuis l’élection de Donald Trump, en novembre 2016.

« Nous avons été trop lents pour détecter l’ingérence russe et y répondre » devrait reconnaître Mark Zuckerberg devant les parlementaires, selon le texte de sa déclaration, publié lundi en amont de son audition. C’est peu dire : après l’arrivée du magnat américain à la Maison Blanche et sous la pression du Congrès, les équipes du réseau social ont découvert que leur plate-forme avait été utilisée à des fins de propagande par l’Internet Research Agency (IRA), le bras armé du régime russe sur Internet. Les contenus proposés par cette officine ont été vus par plus de 120 millions de membres de Facebook. En février, le procureur spécial Robert Mueller a inculpé treize Russes membres de l’IRA pour leur rôle dans l’élection présidentielle américaine de 2016.

Dans son communiqué, Facebook se montre cependant très clair : la nouvelle commission universitaire ne se préoccupera que des élections à venir, et non de l’épisode — douloureux — de 2016.

Offensive de communication sur les élections

Pour éviter qu’il ne se reproduise, Facebook assure en tout cas mettre tout en œuvre et fait feu de tout bois pour en convaincre les responsables politiques et l’opinion publique. Récemment, le réseau social annonçait la suspension de plusieurs comptes et pages pilotés par l’IRA, visant cette fois la Russie et plusieurs pays d’ex-URSS.

La dernière élection présidentielle française est aussi fréquemment avancée par Mark Zuckerberg comme un exemple des progrès réalisés. Facebook a en effet supprimé 30 000 comptes au mois d’avril, mais il s’agissait de comptes sous pseudonymes, répandant toutes sortes de contenus allant du spam aux fausses informations. Sollicité par Le Monde, Facebook n’a pas été en mesure de dire si une partie de ces comptes supprimés étaient gérés par l’IRA ou s’ils menaient plus largement une activité de propagande politique visant la France.