Manifestation à l’aéroport de Francfort, le 10 avril, organisée par le syndicat des employés du secteur public allemand Verdi. Sur les pancartes : « aujourd’hui, grève d’avertissement » et « Nous le valons bien ». / KAI PFAFFENBACH / REUTERS

En Allemagne aussi, les voyageurs vont subir de fortes perturbations pour cause de grève. Actuellement en négociation avec les communes et l’Etat fédéral pour une hausse des salaires dans la fonction publique, le syndicat Verdi a étendu les grèves d’avertissement aux services de sécurité au sol et aux pompiers dans plusieurs aéroports allemands, régis par des conventions collectives du service public. En conséquence, mardi 10 avril, la compagnie aérienne Lufthansa a annoncé la suppression de plus de 800 vols, soit la moitié de ceux prévus ce jour-là. Les aéroports de Munich, Cologne et Brème sont touchés par le mouvement et 90 000 passagers doivent renoncer à leur voyage. Des grèves ont aussi été programmées dans les transports en commun, les crèches, le ramassage des ordures et les hôpitaux de plusieurs villes et régions, dont Berlin, la Bavière et la Rhénanie-du-Nord-Westphalie.

  • Pourquoi ce mouvement ?

Verdi lutte actuellement pour obtenir de fortes augmentations pour les salariés de la fonction publique, fonctionnaires et contractuels. Il s’agit de 2,3 millions de personnes, employées par les communes allemandes et l’Etat fédéral. Verdi réclame 6 à 11,4 % d’augmentation, selon les groupes tarifaires. Il surfe sur la récente victoire d’IG Metall, le puissant syndicat allemand de la métallurgie, qui a arraché début février un accord inédit sur le droit à la semaine de 28 heures – pour une durée limitée – et une hausse des salaires de 4,3 %, après avoir exigé initialement 6 %.

  • Qu’est ce qu’une grève d’avertissement ?

Il s’agit d’une journée de grève censée augmenter la pression sur les employeurs dans les négociations actuelles, avant la dernière des trois séries de négociations salariales du secteur, prévue les 15 et 16 avril.

Ce n’est pas la première grève d’avertissement organisée par Verdi ce printemps. Depuis le mois de mars, selon les informations du syndicat, 70 000 salariés des écoles maternelles et crèches, des pôles emploi, des sociétés de transports en commun et d’autres entreprises publiques ont participé aux grèves.

  • Le mouvement se radicalise-t-il ?

Le blocage des aéroports est un moyen de pression particulièrement puissant et marque une radicalisation du conflit. « Les employeurs n’ont jusqu’ici fait aucune proposition », a justifié Frank Bsirske, président du syndicat Verdi, qui compte presque deux millions de membres.

Le syndicat profite du fait que certaines sociétés d’aéroport sont membres de la fédération patronale des communes. Fraport, l’entreprise qui gère l’aéroport de Francfort, compte ainsi 12 000 salariés régis par la convention collective du service public. Mais la méthode est très contestée, car elle a des conséquences sur des tiers non impliqués dans la négociation tarifaire : les compagnies aériennes.

Lufthansa, à qui cette grève coûte très cher, a vigoureusement protesté. Elle avait conclu fin 2017 un accord sur les salaires avec le syndicat, qui implique normalement l’absence de grève sur une durée déterminée. Celle de mardi est une désagréable surprise pour la compagnie allemande. « Il est totalement inacceptable que le syndicat étende son conflit sur le dos des passagers. Les responsables politiques doivent définir des règles claires pour les grèves et les conflits du travail », a déclaré Bettina Volkens, directrice des ressources humaines chez Lufthansa. Les compagnies exigent depuis plusieurs années que les domaines sensibles comme le transport soient dotés de règles plus sévères pour le recours au droit de grève.