Des soldats israéliens en poste près de la frontière entre Israël et la bande de Gaza lors d’une manifestation de Palestiniens, le 6 avril. / AMIR COHEN / REUTERS

Plusieurs ministres israéliens ont réagi mardi 10 avril à la diffusion d’une vidéo montrant des soldats tirer sur un Palestinien non armé dans la bande de Gaza et se réjouir bruyamment de l’avoir atteint.

Cette vidéo a été diffusée lundi soir par 10, une chaîne de télévision israélienne privée, qui n’a pas précisé comment elle l’avait obtenue, avant d’être largement reprise sur les réseaux sociaux et dans les médias israéliens.

Les images semblent d’abord montrer un Palestinien immobile près de la barrière marquant la frontière entre Israël et la bande de Gaza. Ce dernier, qui ne semble pas représenter une menace immédiate, est ensuite touché par des tirs en provenance d’une position occupée par des soldats sur le territoire israélien. Au moment où le Palestinien s’écroule, des cris de joie poussés apparemment par des soldats israéliens sont entendus : « Quelle vidéo, fils de pute, quelle vidéo, bien sûr que j’ai filmé ! »

Une vidéo de décembre 2017, selon l’armée

Après avoir annoncé l’ouverture d’une « enquête approfondie », l’armée israélienne a confirmé mardi l’authenticité de cette vidéo tout en assurant qu’elle datait de décembre 2017. « Après avoir tenté de disperser les émeutiers (…) une balle a été tirée en direction d’un des Palestiniens soupçonnés d’être le meneur des émeutiers. Il a été touché à la jambe », affirme Tsahal dans un communiqué. Il était impossible de savoir si le Palestinien touché a été tué.

« Le sniper devrait recevoir une médaille et celui qui a filmé être rétrogradé », a réagi mardi le ministre de la défense israélien, Avigdor Lieberman. « On en fait beaucoup trop avec cette vidéo. Il ne s’agit pas de tirs sur n’importe qui, mais sur un terroriste qui s’approche de la barrière dans une zone interdite d’accès et en provenance d’une région contrôlée par les terroristes du Hamas », a pour sa part affirmé le ministre de la sécurité intérieure, Gilad Erdan.

Naftali Bennett, ministre de l’éducation et dirigeant du parti nationaliste religieux Foyer juif, a lui aussi défendu les actions des troupes israéliennes :

« Juger les soldats parce qu’ils ne se sont pas exprimés de façon élégante alors qu’ils sont en train de défendre nos frontières, ce n’est pas sérieux. Je soutiens tous les soldats. »

« La question des tireurs d’élite n’est pas nouvelle »

« Depuis des lustres, personne ne nous écoute ou ne nous croit à moins que l’on ne présente un document d’origine israélienne », a de son côté regretté la dirigeante palestinienne Hanane Achraoui, membre du comité exécutif de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). « La question des tireurs d’élite n’est pas nouvelle et il est temps que le monde croit ce que nous ne cessons de dire » sur la répression israélienne, a-t-elle ajouté.

La diffusion de ces images survient alors que l’armée israélienne est au cœur d’une polémique sur les consignes de tirs, après que 31 Palestiniens ont été tués par des soldats lors de récentes manifestations à la frontière avec la bande de Gaza.

Des organisations de défense des droits de l’homme dénoncent un usage de la force disproportionné. Le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (ONU), Antonio Guterres, et l’Union européenne ont réclamé une « enquête indépendante » sur l’usage par Israël de balles réelles ; une demande rejetée par l’Etat hébreu.

L’armée israélienne affirme que les tireurs déployés le long de la frontière avec la bande de Gaza n’ont le droit de tirer sur des manifestants que s’ils sont armés, menacent la vie de soldats, tentent de s’infiltrer en territoire israélien ou de saboter la barrière de sécurité.

Jeudi, l’ONG israélienne B’Tselem a lancé une campagne appelant les soldats israéliens à ne pas ouvrir le feu sur des Palestiniens non armés.

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