Franck Ribéry, le 31 mars, contre le Borussia Dortmund à l’Allianz Arena de Munich. / Andreas Gebert / Andreas Gebert/dpa

On joue depuis un peu plus de trente minutes, ce 3 avril au stade Sanchez-Pizjuan, à Séville, quand Franck Ribéry assomme les supporteurs andalous. Le gaucher du Bayern Munich entre dans la surface de réparation espagnole et force un défenseur adverse à détourner dans ses cages son centre sans contrôle à destination de Robert Lewandowski. A vingt minutes de la fin de la rencontre, le Nordiste envoie l’estocade finale en signant une passe décisive sur le second but bavarois dans ce quart de finale aller de la Ligue des champions. Une victoire (2-1) qui place les Allemands dans des conditions favorables à l’heure de recevoir, mercredi 11 avril, le club sévillan pour le match retour. Et un succès dont Franck Ribéry aura été l’artisan principal.

A 35 ans – il a fêté son anniversaire samedi en offrant un sixième titre de champion d’Allemagne d’affilée au Rekordmeister –, le Nordiste tutoie de nouveau les sommets du football. S’appuyant sur un jeu fondé sur l’explosivité et ponctué de doubles accélérations, des qualités qui ont tendance à s’étioler avec les années, le troisième du Ballon d’or 2013 « fait taire ses détracteurs », observe Patrick Guillou. Né et ayant grandi outre-Rhin, l’ancien défenseur de Saint-Etienne est devenu un observateur averti de la Bundesliga, qu’il commente aujourd’hui pour BeIN Sports. « Ces dernières semaines, il est décisif comme passeur et comme buteur, tant en Bundesliga qu’en Ligue des champions. Qu’il retrouve ce niveau de performance à 35 ans, ça témoigne de la force de son caractère. » Pour autant, l’ancien entraîneur adjoint de Willy Sagnol à Bordeaux refuse de parler de « renaissance » du roi français de Bavière, car ses performances sont « dans la continuité de ce qu’il a fait lors des dix dernières années au Bayern ».

Influence cruciale de Jupp Heynckes

Rétabli d’une blessure au genou l’ayant privé des terrains pendant une partie de la saison, Ribéry bénéficie également du changement d’entraîneur opéré par le Bayern Munich à l’automne. En rappelant Jupp Heynckes en remplacement de Carlo Ancelotti, les dirigeants bavarois ont confié le club à « un entraîneur qui a une influence très importante sur Franck », souligne l’ancien défenseur du Bayern Valérien Ismaël. Et celui qui vit non loin de la capitale bavaroise de relever le « lien profond et le très grand respect mutuel » affiché par le joueur et le coach âgé 72 ans. Samedi, à Augsbourg, l’entraîneur a ainsi demandé au kop bavarois célébrant le titre de champion d’Allemagne d’acclamer son joueur. Celui qui, avec un huitième titre de champion en onze ans (vingt et un trophées au total), venait de devenir l’égal des mythes munichois Oliver Kahn, Philipp Lahm, Mehmet Scholl et Bastian Schweinsteiger.

Depuis le retour aux manettes de l’homme qui a mené les Mia San Mia (« Nous sommes nous » en bavarois, la devise du club) au triplé Coupe-championnat-Ligue des champions de 2013, l’ancien gamin de la cité populaire du Chemin-Vert à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) retrouve son influence sur le jeu du Bayern. « Heynckes était responsable de mon excellent niveau en 2013, et je suis très content qu’il soit de retour, se félicitait-il en octobre. Il donne confiance aux joueurs, il a insufflé une nouvelle vie et a soudé l’équipe. »

« Niveau de classe mondiale »

Fonctionnant à l’affect, Franck Ribéry n’a pas toujours pu établir avec ses entraîneurs au Bayern – il en a vu passer huit depuis son arrivée en 2007 – un rapport privilégié. Mais « la relation de confiance qu’il a avec Jupp Heynckes lui a permis de complètement se relâcher. Et l’on retrouve le Franck Ribéry de ses débuts », abonde Patrick Guillou. Qui met également à l’actif du technicien allemand d’avoir replacé David Alaba, avec qui Ribéry formait « le meilleur binôme sur le côté gauche en Europe en 2013 », derrière le Nordiste. L’international autrichien a retrouvé son poste et sa relation préférentielle avec le Français, dont il n’a de cesse de souligner l’importance, sur le terrain comme en dehors.

S’il ne se blesse pas, Valérien Ismaël voit bien Franck Ribéry poursuivre sa carrière « un deux ans encore ». Et comme Arjen Robben, son virevoltant compère de l’autre aile du Bayern, le Français, en fin de contrat, aspire à poursuivre l’aventure sous les couleurs bavaroises. Une fin de carrière loin des Bleus mais dans « un club dont il a marqué l’histoire », où l’ex-entraîneur de Wolfsburg l’imagine transmettre le flambeau à son compatriote Kingsley Coman. Le week-end passé, le président du club bavarois, Karl-Heinz Rummenigge, a ouvert la voie à une prolongation de ses deux papys flingueurs. Deux joueurs « à un niveau de classe mondiale » sur lesquels il compte pour poursuivre l’aventure en Ligue des champions cette saison.