Julien Coupat, le 13 mars au palais de justice de Paris. / ALAIN JOCARD / AFP

Le tribunal correctionnel de Paris a rendu son jugement dans le procès de Tarnac, dix ans après le début de l’affaire. Julien Coupat et Yildune Lévy, qui comparaissaient notamment pour « association de malfaiteurs », ont été relaxés, jeudi 12 avril. Six autres militants du même groupe étaient également jugés. Un seul a été condamné à quatre mois de prison avec sursis.

Ils étaient accusés d’avoir participé au sabotage d’une ligne TGV en novembre 2008. Ils avaient été arrêtés peu après dans le village corrézien de Tarnac, devenu le symbole de l’affaire.

L’enquête avait alors été présentée comme relevant du terrorisme, le gouvernement de l’époque mettant en avant les « risques de résurgence violente de l’extrême gauche ». Le procureur de Paris, Jean-Claude Marin, évoquait « une structure appelée “cellule invisible”, qui avait pour projet la lutte armée »

Mais l’enquête s’est ensuite enlisée, plusieurs failles apparaissant dans la procédure, et la qualification terroriste avait finalement été abandonnée. Pour la présidente du tribunal, Corinne Goetzmann, « l’audience a permis de comprendre que le groupe de Tarnac était une fiction ».

Au cours du procès, les débats ont notamment tourné autour du « PV 104 », procès-verbal d’une filature de dix-neuf heures entre les 7 et 8 novembre 2008 sur la Mercedes de Julien Coupat et Yildune Lévy. Il constitue la pièce centrale de l’accusation mais de nombreuses erreurs et anomalies ont été mises en évidence par la défense. Ainsi pour Mme Goetzmann, « le procès-verbal de surveillance ne démontre pas qu’ils seraient les auteurs des dégradations ».

Les méthodes de l’antiterrorisme critiquées

Le procureur de la République, Olivier Christen, avait d’ailleurs requis des peines symboliques fin mars : quatre ans d’emprisonnement dont quarante-deux mois avec sursis contre Julien Coupat, et deux ans dont vingt-deux mois avec sursis pour Yildune Lévy. Soit, respectivement, six mois et deux mois ferme : exactement la durée de la détention provisoire effectuée par l’un et l’autre au lendemain de leurs interpellations, en 2008.

« Il faut prendre en compte le temps passé et [leur] personnalité. Et la société n’aurait rien à gagner à ce qu’ils soient condamnés à des peines qui les ramèneraient en prison », avait expliqué M. Christen avant d’admettre que « le “groupe de Tarnac” n’existe pas ; c’est une construction policière ». De leur côté, les avocats de la défense ont plaidé une relaxe générale, dénonçant les méthodes de l’antiterrorisme dans cette enquête et « une procédure où il n’y a plus rien à sauver ».

« Il faut que cette affaire se finisse dignement, avait notamment lancé Me Marie Dosé, avocate de Yildune Lévy. Elle a coûté assez de dignité à Yildune Lévy et aux autres, et la loyauté de ces trois semaines d’audience ne réparera pas ça. La justice doit cesser de s’enliser dans cette affaire, elle en a assez souffert. Rien ne permet de condamner Yildune Lévy et les autres prévenus. Il est temps de les libérer de ce fiasco ! »