Les Marseillais se sont qualifiés pour les demi-finales de la Ligue Europa. / BORIS HORVAT / AFP

L’effet de douche froide n’a duré que quatre puis cinq minutes, de rares instants de léthargie au cours d’une folle soirée marseillaise, pendant lesquels l’OM était éliminé de la Ligue Europa avant de brillamment décrocher sa place en demi-finale. Le temps d’abord d’égaliser sous la pluie, après une entame de match catastrophique, ponctuée par l’ouverture du score du RB Leipzig dès la 2e minute de jeu. Ensuite d’inscrire en deuxième période, après la réduction du score des Allemands, un quatrième but, celui d’une qualification acquise, jeudi 12 avril, sur le score fleuve de 5 à 2.

Une première période mémorable, assortie de trois buts, avait permis à l’Olympique de Marseille de renverser le score défavorable du quart de finale aller (1-0). Les joueurs olympiens n’auront pas plongé longtemps leurs supporteurs dans le doute. Ils n’avaient pas l’intention de laisser échapper la demi-finale de Ligue Europa qui leur tendait les bras, une première dans cette compétition [mais la sixième demie européenne de leur histoire].

Interrogé la veille de la rencontre, Franck, un membre de la Vieille Garde, collectif qui a fondé le premier groupe ultra de l’OM en 1984, avait justement prédit : « Je pense quand même pour parler marseillais que l’on va leur faire vivre un enfer. Si les joueurs répondent présent dans le premier quart d’heure, montrent une envie d’aller en “demi”, le stade va être survolté. »

« Moments de communion collective »

Le spectacle a largement répondu à ses attentes et à celles de ses collègues. À l’image du coup d’éclat libérateur réussit à l’heure de jeu par le héros de la soirée, Dimitri Payet. « On avait besoin du 12e homme, ce résultat on l’a fait ensemble. Quand on a marqué le deuxième but et que ça a commencé à trembler, on s’est dit qu’il y avait la place », a raconté l’international français. Son jeune coéquipier Maxime Lopez (20 ans), cent pour cent minot, n’en revenait pas : « Les supporters m’ont fait rêver toute ma jeunesse et même ce soir ils m’ont fait rêver. »

Leur entraîneur Rudi Garcia a salué lui aussi l’apport du public : « On fait ce métier pour ces moments-là, de communion collective. C’est une grande soirée de Coupe d’Europe. La fierté, c’est aussi de voir un Vélodrome en feu toute la soirée. On se rend compte combien ce stade et ce public peuvent être spéciaux. »

Dimitri Payet a inscrit le quatrième but, celui de la qualification de l’OM. / JEAN-PAUL PELISSIER / REUTERS

Une fois la rencontre achevée par un cinquième but anecdotique mais ô combien jouissif inscrit par le Japonais Hiroki Sakai, le speaker du stade Vélodrome pouvait entonner à l’unisson avec l’ensemble des spectateurs le fameux chant de la victoire : « Nous sommes Marseillais et nous avons gagné ». Un moment rare à rendre n’importe quel aigri un peu phocéen. Trente minutes après le coup de sifflet de l’arbitre, les centaines de membres des Fanatics continuaient de fêter leurs protégés dans leur virage nord. Et, dans les rues bondées de Marseille, même les camions de nettoyage klaxonnent les soirs de victoire.

Dépassé dimanche dernier par Lyon sur le podium de la Ligue 1, alors que seules les trois premières places permettent de se qualifier pour la lucrative Ligue des champions, l’OM devait bien cela à ses nombreux supporteurs. Ils étaient en effet venus en masse, plus de 61 000, synonyme d’une affluence record pour un match de Coupe d’Europe depuis un quart de finale disputé en 2004 face aux Anglais de Newcastle. À l’époque, Marseille avait atteint la finale de la défunte Coupe de l’UEFA, battu en finale par les Espagnols de Valence.

Cette année, pour renouveler l’exploit, le tirage au sort, programmé vendredi 13 avril à 13 heures, offrira, par la grâce du hasard, soit les prestigieux adversaires anglais d’Arsenal ou espagnols de l’Atletico Madrid, soit les moins redoutables autrichiens de Salzbourg. Parfois réticent à aligner son équipe type lors des premiers matchs, Rudi Garcia s’est pris au jeu d’une compétition qui n’est jamais aussi intéressante que lorsqu’on se rapproche du but : « On sait qu’on pourra compter sur le public et qu’il sera notre douzième homme en demi-finale, où il n’y a que de grosses équipes. Mais on a un seul objectif : aller en finale. »

À Lyon pour une revanche ?

Pied de nez à la forte rivalité croissante qui oppose l’Olympique de Marseille à l’Olympique lyonnais, la finale de la Ligue Europa aura lieu le 16 mai prochain dans le stade qui appartient à l’OL. On imagine la tête du président Jean-Michel Aulas, dont le club a été piteusement éliminé en 8e de finale par le CSKA Moscou, si Marseille venait remporter au printemps sur ses terres une deuxième coupe d’Europe.

Le 18 mars dernier, la victoire lyonnaise à Marseille (3-2) s’était suivie d’une algarade générale mêlant joueurs, dirigeants et personnels de sécurité. La perspective d’un déplacement dans le Rhône réjouit déjà les fans provençaux, dont certains chambraient à la sortie du stade « Jean-Michel Aulas ! Jean-Michel Aulas ! On va venir la gagner chez toi ! ».

A l’inverse de ses supporteurs, Dimitri Payet se montre prudent : « On ne va pas être prétentieux, quand on voit le dernier carré, il y a des équipes bâties pour gagner même la Ligue des champions. » Le coach du RB Leipzig, Ralph Hasenhüttl, croit, lui, en les chances marseillaises. « Maintenant, oui, Marseille peut remporter cette compétition. D’autres équipes sont de très bon niveau. Mais Marseille a démontré qu’il pouvait très bien faire chez lui », a pronostiqué l’Autrichien.

S’il est entendu, Marseille n’aurait pas même besoin de terminer parmi les trois premiers du championnat. Le vainqueur de la Ligue Europa gagne en effet son billet pour la Ligue des champions. Une victoire à plusieurs dizaines de millions d’euros.