Des éoliennes en mer dans le parc éolien offshore Eneco Luchterduinen près d’Amsterdam, le 26 septembre 2017. | Yves Herman / REUTERS

Trois mois pour négocier. Après plusieurs mois de tergiversations, le gouvernement a finalement mis au point sa stratégie sur l’éolien en mer. « Une négociation va s’engager dans les prochains jours avec les lauréats pour faire baisser les coûts », explique-t-on au ministère de la transition écologique et solidaire. « Ce sera aux professionnels de faire des propositions », prévient-on. Mais si les coûts des projets restent élevés, le gouvernement menace d’annuler purement simplement les appels d’offres octroyés en 2012 et 2014 et d’en relancer de nouveaux sur les mêmes zones.

Pour comprendre cet imbroglio, il faut revenir au lancement de ces premiers appels d’offres offshore en France, en 2011 : trois sont remportés par EDF, allié à Alstom (dont la branche énergie est devenue General Electric), et l’un par l’espagnol Iberdrola. En 2014, Engie et Siemens remportent un autre projet au large du Tréport (Seine-Maritime). A l’époque, le secteur est enthousiaste et affiche son optimisme. Mais les recours se multiplient, le cadre réglementaire n’est pas prêt, les autorisations tardent à venir. Les projets s’embourbent. Tous accusent d’importants retards et aucun ne devrait voir le jour avant 2020, voire 2021.

La France apparaît très à la traîne vis-à-vis de ses voisins : alors que plus de 4 000 éoliennes en mer tournent en Europe et que le pays possède la première façade maritime du continent, l’Hexagone ne compte toujours aucune éolienne offshore en activité.

« Des baisses de tarifs significatives »

Non seulement tout a pris du retard, mais en outre, les coûts de l’offshore ont drastiquement baissé ailleurs en Europe, particulièrement en Allemagne et au Danemark. Le gouvernement d’Edouard Philippe a pris acte des délais mais estime maintenant que les porteurs de projets doivent accepter de baisser leurs tarifs de rachat.

Elément essentiel : à l’époque, les appels d’offres ont été attribués à des tarifs d’électricité avoisinant les 190 euros le mégawattheure. Autrement dit : l’Etat s’engage à racheter à ce prix extrêmement élevé – six fois plus que le tarif moyen du marché – sur une période de vingt ans, pour soutenir la création d’une filière naissante. Les tarifs ont depuis chuté en Europe : au Royaume-Uni ou en Allemagne, ils se situent aujourd’hui aux environs de 60 euros le MWh.

« On s’attend à des baisses de tarifs significatives compte tenu de celles observées ailleurs en Europe », dit-on au gouvernement. Mais cette comparaison est à relativiser : les projets plus anciens lancés en Allemagne ou au Royaume-Uni, actuellement en cours de construction, l’ont été à des coûts moyens de 160 à 180 euros le MWh, ce qui est « cohérent » avec les prix français, assure le Syndicat des énergies renouvelables (SER).

« Utiliser le même argent pour en faire plus »

« On ouvre enfin les négociations », se réjouit Jean-Louis Bal, président du SER. « Mais c’est le seul aspect positif : les prix annoncés en Europe du Nord ne concernent pas des projets qui se réalisent actuellement et sont basés sur des éoliennes qui n’existent pas. Si cela aboutissait à remettre en cause tous les projets, la filière industrielle serait anéantie, les usines existantes devraient licencier », prévient-il. Selon le SER, cette filière pourrait générer plus de 15 000 emplois à terme.

Le gouvernement assure qu’il est déterminé à ce que ces parcs éoliens voient le jour et qu’il souhaite soutenir cette filière industrielle. « Il faut faire plus d’énergies renouvelables avec les mêmes moyens. Il faut utiliser le même argent pour en faire plus », assurait fin mars le ministre de la transition écologique et solidaire Nicolas Hulot, au Forum de la transition énergétique des Echos. « C’est une méthode de négociation très ferme », s’inquiète-t-on chez un des porteurs de projet.