Le Stade-Vélodrome lors de la réception de Lyon, le 18 mars 2018. / PHILIPPE LAURENSON / REUTERS

Les supporteurs de l’OM qui ont rempli à plus de 61 000, un Vélodrome transformé en autocuiseur pour le quart de finale de Ligue Europa contre Leipzig s’en moquent peut-être et pensent davantage à la demi-finale contre Salzbourg. Mais leur stade est au cœur de deux procédures ouvertes contre son propriétaire, la municipalité, devant le tribunal administratif de Marseille et la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

Lundi 16 avril, le conseiller d’arrondissement socialiste Laurent Lhardit, un temps proche de l’ex-ministre Marie-Arlette Carlotti, a lancé une requête en annulation devant la justice administrative. Il conteste la convention qui fixe le loyer que doit payer chaque année l’OM à la Ville de Marseille. Pour l’élu, cet accord passé en octobre 2017, mais valable jusqu’en 2020, « favorise trop le club et pénalise les contribuables ».

Selon cette convention, l’OM s’est engagé à payer chaque année 5 millions d’euros de loyer fixe et une part variable, qui dépend de son propre chiffre d’affaires lié au stade. Si les recettes de billetterie, panneaux publicitaires et « hospitalités », soit les places business sur lesquelles le club insiste fortement, dépassent 40 millions d’euros, le loyer augmente automatiquement. Entre 40 millions et 50 millions d’euros, l’OM rétrocède 2,5 % de ce surplus à la ville, 5 % entre 50 millions et 60 millions d’euros et ainsi de suite, par tranche de 2,5 %. « Un accord gagnant-gagnant » pour le président de l’OM, Jacques-Henri Eyraud, qui trouve logique de ne pas plomber les comptes de son club sans certitude de résultat.

Les droits télé exclus du calcul

Laurent Lhardit, lui, appuie sa requête sur ce qu’il considère être une bizarrerie : l’absence totale de prise en compte des droits télévisés dans le calcul des « recettes stade » de l’OM. « Des droits qui, même s’ils ne concernent pas des matches joués uniquement au Vélodrome, ont représenté plus de 40 millions d’euros la saison dernière, ce qui fausse complètement l’assiette prise en compte pour calculer le loyer », explique-t-il.

A l’appui de sa requête, une jurisprudence qui a frappé le tournoi de tennis de Roland-Garros en 2013, la cour d’appel de Paris obligeant l’organisateur à prendre en compte les « redevances média » dans sa part variable de recettes. Si le tribunal administratif suit cette logique, elle pourrait annuler la convention en cours et pousser l’OM et la Ville de Marseille à se remettre autour d’une table pour négocier un loyer à la hausse.

L’issue d’une seconde procédure pourrait être moins favorable aux contribuables marseillais. Lors du conseil municipal de lundi 9 avril, les élus ont discrètement validé une délibération provisionnant 480 000 euros sur le budget 2018, dans le cadre d’un litige opposant « la Ville de Marseille à l’architecte de la version antérieure du Stade-Vélodrome ». Une procédure au long cours qui doit trouver un épilogue devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

Le toit de la discorde

Jean-Pierre Buffi, architecte renommé qui avait piloté la rénovation et l’agrandissement du Vélodrome pour la Coupe du monde 1998, poursuit la municipalité marseillaise pour « atteinte au droit de propriété intellectuelle ». Et réclame une indemnisation frôlant le demi-million d’euros, à la suite des travaux effectués sur l’équipement sportif qui, dit-il, « masquent presque totalement la création précédente ».

« Il faut remonter à la rénovation de 1998, explicite l’architecte. A l’époque, nous avons remporté le concours en répondant à un certain cahier des charges, dicté par un financement limité qui ne permettait pas la réalisation d’une couverture [43,5 millions d’euros]. » Le Stade-Vélodrome de 1998, porté de 42 000 à 60 000 places, s’évasait vers le ciel, « coque de bateau posée sur cales », selon la communication de l’époque. « Mais cette forme avait aussi été prévue pour pouvoir installer une couverture le cas échéant. Une structure en paliers que nous avions anticipée », poursuit Jean-Pierre Buffi.

Moins de treize ans plus tard, Marseille a opté pour une réfection plus profonde, notamment en raison de l’évolution importante des normes de sécurité et d’accueil imposées par l’Union européenne de football (UEFA). Jean-Pierre Buffi estime, lui, que la consultation s’est « faite dans son dos », sans qu’il puisse proposer sa solution de couverture. Le tribunal de grande instance de Marseille a repoussé sa demande une première fois le 24 mars 2016. « Nous avons provisionné par prudence, car l’appel devrait être étudié cette année », explique l’adjoint aux finances, Roland Blum.

Depuis qu’il a décidé de faire rénover le Vélodrome pour l’Euro 2016, le maire Les Républicains, Jean-Claude Gaudin, voit régulièrement la question du coût pour le contribuable marseillais revenir dans le débat. La chambre régionale des comptes a ainsi chiffré à 550 millions d’euros la véritable facture de la couverture et la remise aux normes du Stade-Vélodrome. Une somme colossale qui s’explique notamment par les conditions du partenariat public-privé (PPP) avec la société Arema, alors filiale du groupe Bouygues, choisi par M. Gaudin.