Comment convaincre les élus ruraux que la baisse de la vitesse de 90 à 80 km/h, à partir du 1er juillet, sur de belles routes départementales dépourvues de séparateur central ne va pas pénaliser les automobilistes coincés derrière des camions, mais au contraire sauver des vies ? En leur prouvant que ces routes, en dépit des apparences, sont dangereuses.

C’est ce que fait l’Observatoire interministériel de la sécurité routière (Onisr) dans une étude intitulée « L’Accidentalité sur les routes bidirectionnelles hors agglomération », rendue publique mardi 17avril – soit deux jours avant qu’un groupe de travail du Sénat ne présente à la presse son propre rapport sur la question. « Même s’il est contre-intuitif que le réseau le plus confortable soit celui qui enregistre le plus d’accidents mortels, les études successives confirment que les bénéfices d’un abaissement de la vitesse moyenne autorisée seront en grande partie liés à ce réseau », indique l’Onisr.

Les Bouches-du-Rhône en tête

Certaines de ces routes paraissent sûres parce qu’elles ont bénéficié d’aménagements tels que des « rectifications de virages, des dégagements de visibilité, des voies spécifiques pour tourner à gauche aux carrefours, des accotements stabilisés, voire des plates-formes larges incluant des créneaux de dépassement ». De ce fait, elles sont « privilégiées pour porter non seulement le trafic local, mais aussi celui de transit ».

Or, c’est l’importance de leur trafic qui les rend dangereuses : elles « enregistrent une proportion de morts supérieure à [leur] part de réseau ». En moyenne, « 10 % des routes ayant soit le plus fort trafic, soit la dimension stratégique la plus élevée concentrent 38 % de la mortalité sur les routes bidirectionnelles hors agglomération ».

Cela est vrai « quel que soit le département », indique l’Onisr. Les départements qui comptent le plus de tués sur les routes bidirectionnelles hors agglomération, entre 2012 et 2016, sont les départements à métropole urbaine. En tête viennent les Bouches-du-Rhône (286 morts), la Gironde (234), la Loire-Atlantique (224), ou l’Isère (166). Les départements dans lesquels la proportion de tués sur route bidirectionnelle, par rapport au total des tués, est la plus importante sont ruraux. En tête viennent les Alpes-de-Haute-Provence (81 %), les Hautes-Alpes (80 %), l’Orne (79 %), le Gers (78 %), la Haute-Loire (78 %), le Lot (76 %) et le Cantal (76 %).