1996-1999 : la transformation à petites touches

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« Il n’a aucune expérience du football anglais, il vient du Japon » : le tacle, les deux pieds décollés du sol, vient d’Alex Ferguson, pas encore « sir », déjà brut de décoffrage. Il résume l’opinion générale en Angleterre lorsqu’Arsenal annonce l’arrivée d’un inconnu nommé Arsène Wenger. « Arsène who ? », demande l’Evening Standard, rapidement copié par le reste de la presse londonienne. Les lunettes rondes et le costume mal taillé – nous sommes dans les années 1990 – n’aident pas et, pourtant, Arsène Wenger, moqué par le vestiaire d’Arsenal, ramène vite les joueurs à ses opinions. En matière de jeu comme de diététique.

Wenger conserve le « back four » 100 % britannique qui fait la force d’Arsenal, mais bannit la culture de la bière, les écarts caloriques et les relances loin devant. Il finit troisième dès la première année. Un tour de force, tant l’équipe a peu changé. Patrick Vieira, jeune milieu de terrain arrivé à l’intersaison, et Dennis Bergkamp, déjà au club, sont les seuls étrangers titulaires. L’année suivante, avec une équipe plus à son image – Emmanuel Petit, Marc Overmars, Nicolas Anelka –, Wenger réussit le doublé Coupe-championnat.

1999-2004 : les « Invincibles » d’outre-Manche

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Arsenal prend une teinte franchement internationale et particulièrement française, avec le renfort de Thierry Henry. Pas une semaine sans que Téléfoot ne mette les pieds à Highbury, où brillent aussi Vieira, Petit, Gilles Grimandi puis Robert Pirès et Sylvain Wiltord. Nouveau doublé national en 2002. Outre Sol Campbell en patron de la défense, Ljungberg, Bergkamp et Nwanko Kanu apportent aussi leur écot à une succession de campagnes réussies, qui culminera en 2003-2004 avec la saison des « Invincibles », jamais battus en Premier League toute la saison.

Mais les difficultés européennes sont déjà là : une défaite inattendue en finale de la Coupe de l’UEFA en 2000, contre Galatasaray, et aucune présence dans le dernier carré de la Ligue des champions.

2005-2012 : à la diète

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Lorsque Arsenal remporte la Coupe d’Angleterre contre Manchester United en 2005, peu imagine que les Gunners ne lèveront plus de trophée pendant neuf ans. Et pourtant : Arsenal est en fin de cycle et la finale perdue au Stade de France contre le FC Barcelone, en 2006, n’est qu’une illusion. Pour la première fois cette saison-là, Arsène Wenger ne finit pas dans les deux premiers du championnat.

Thierry Henry quitte le club l’année suivante – comme le vice-président David Dein, allié de Wenger à la direction – et Arsenal n’a plus les moyens de lutter pour acheter les meilleurs attaquants du monde : les finances du club sont grevées par la construction de l’Emirates Stadium, qui sort de terre en 2006 pour remplacer Highbury. Wenger s’en remet à de jeunes joueurs (Fabregas, Van Persie) et tente de faire des coups sur le marché des transferts, certains réussis (Nasri, Adebayor), d’autres ratés (Arshavine, Chamakh).

Lassées de ne pas gagner, ses vedettes quittent généralement le navire pour la concurrence, qui les paye d’autant mieux que l’argent russe et émirati a inondé Chelsea et Manchester City. Wenger, lui, s’émeut régulièrement des montants investis par ses adversaires pour recruter.

2013-2018 : le dernier baroud

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C’est l’heure des premiers doutes dans les tribunes d’Arsenal, où la statue du commandeur ne semble plus indéboulonnable. Wenger perd certaines de ses prérogatives au sein du club, au moment où il a à nouveau les coudées franches financièrement pour recruter. Il mise gros sur des joueurs offensifs comme Mesut Özil ou Alexis Sanchez, sans jamais se résoudre à recruter une mégastar qui mettrait l’équilibre de l’équipe en péril.

Le jeu, pourtant, n’est plus si flamboyant. Quelques défaites humiliantes, dont un 6-0 à Chelsea pour son 1 000e match à Arsenal, déstabilisent l’Alsacien. Il se console dans les Coupes nationales et avec une qualification chaque année en Ligue des champions, qui garantit son maintien en poste, mais l’écart avec le haut niveau européen est chaque année plus flagrant encore, jusqu’à une claque 10-2 en match aller-retour face au Bayern Munich, l’an dernier, en huitièmes de finale de la Ligue des champions.

Paradoxalement, Wenger pourrait finir sa carrière à Arsenal sur un premier titre européen au terme de la plus laborieuse de ses 22 saisons : il affrontera l’Atletico Madrid en demi-finales de la Ligue Europa.