Au moins 10 000 personnes sont descendues dans la rue en Afrique du Sud, mercredi 25 avril, lors d’une grève générale contre l’introduction d’un salaire minimum de 20 rands par heure (1,30 euro). « C’est une honte », estime un manifestant à Johannesburg, Martin Kgaladi, salarié dans l’industrie automobile qui porte un tee-shirt dénonçant « un salaire d’esclave ».

Le salaire minimum, une première en Afrique du Sud, doit entrer en vigueur le 1er mai, deux mois et demi après l’arrivée au pouvoir de Cyril Ramaphosa. Le président a fait de la relance de l’économie de la première puissance industrielle du continent l’une de ses priorités.

Les grévistes protestent également contre l’introduction prochaine de nouvelles lois qui limitent, selon eux, le droit de grève. « C’est un retour en arrière, vingt-quatre ans après l’avènement de la démocratie » en Afrique du Sud, ajoute Martin Kgaladi, rappelant que « pendant le régime de l’apartheid, on nous empêchait de faire grève ». « On s’est battus pour être libres et on dirait qu’on revient en arrière », abonde Mntomzi Ngxazana, 45 ans, à Johannesburg.

Les grévistes, qui ont défilé dans plusieurs autres villes du pays dont Le Cap, Durban et Port Elizabeth, ont répondu à l’appel à la grève lancé par la deuxième fédération syndicale du pays, la Saftu. Le parti de la gauche radicale des Combattants pour la liberté économique (EFF), de Julius Malema, s’est associé au mouvement d’une journée. En revanche, la plus grande centrale syndicale du pays, la Cosatu, alliée du gouvernement, n’a pas appelé à la mobilisation, estimant que près de la moitié des travailleurs (47 %) allaient profiter de l’introduction du salaire minimum.

Des inégalités criantes

« On demande un salaire pour vivre, pas un salaire minimum », « Défendons le droit de faire grève », pouvait-on lire sur les pancartes brandies par les manifestants à Johannesburg. Avec l’introduction du salaire minimum, « je crains que nos salaires soient revus à la baisse », s’inquiète Idah Zondo, qui travaille dans l’industrie cosmétique et gagne 50 rands de l’heure.

Ces manifestations constituent le premier mouvement social d’importance auquel est confronté le président Ramaphosa, un ancien syndicaliste devenu homme d’affaires à succès. « Cyril Ramaphosa a été capturé par les capitalistes. Il est devenu capitaliste, oppressant les travailleurs qu’il défendait », regrette Martin Kgaladi. Dans un communiqué, la Saftu a dénoncé la « déclaration de guerre féroce de la classe dirigeante représentant le monopole capitaliste blanc, qui essaie de faire passer de nouvelles lois qui enracinent la pauvreté ».

Près d’un quart de siècle après la fin officielle du régime ségrégationniste blanc, les inégalités économiques restent criantes en Afrique du Sud. Le salaire mensuel médian est de 10 000 rands (environ 660 euros) parmi la minorité blanche et de 2 800 rands parmi la majorité noire, selon l’Institut sud-africain des relations raciales.