Les jours de Telegram étaient comptés. La justice iranienne a ordonné, lundi 30 avril, le blocage du réseau de messagerie le plus populaire d’Iran. Rapportée par Mizan Online, l’agence de presse de l’Autorité judiciaire, cette décision était attendue depuis que le gouvernement avait ordonné, mi-avril, à tous les organes de l’État de cesser d’utiliser Telegram pour leurs communications externes.

Tous les fournisseurs d’accès à internet et les opérateurs téléphoniques « ont le devoir de bloquer totalement à partir d’aujourd’hui l’accès à Telegram », rapporte Mizan, citant la décision du juge. En dépit de cette décision, des journalistes de l’Agence France-Presse (AFP) ont constaté que la messagerie restait accessible lundi soir.

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Le jugement impose d’empêcher tout accès à Telegram via un logiciel de type VPN (« virtual private network », ou réseau privé virtuel), avertissant qu’en cas contraire, « cela sera considéré comme une contravention à l’ordre de la justice et poursuivi », précise Mizan.

Le tribunal a agi sur la base de nombreuses plaintes contre Telegram, reconnu coupable entre autres de « perturbation de l’unité nationale », d’« incitation à la révolte », d’« espionnage », de propagation « d’écrits et de contenus obscènes […] encourageant la corruption et la prostitution », d’insulte à l’islam ou encore d’« action contre la sécurité nationale de la part des groupes terroristes ».

Une absence de coopération

Le chef de la police chargé de la lutte contre la criminalité sur Internet, le général Kamal Hadianfar, avait accusé lundi matin Telegram de ne pas coopérer avec les autorités en matière de lutte contre le terrorisme. Malheureusement, « des réseaux de messagerie comme Telegram ne coopèrent d’aucune façon avec nous », a-t-il déclaré à l’agence de presse Isna, tandis que 26 personnes comparaissent en justice depuis samedi pour leur implication présumée dans deux attentats revendiqués par le groupe État islamique (EI) et ayant fait 17 morts à Téhéran le 7 juin 2017.

« Ces gens qui sont en train d’être jugés ont utilisé Telegram pour toutes leurs […] communications entre eux. Malheureusement, le directeur de Telegram ne nous a absolument pas aidés à ce sujet », affirme encore le général Hadianfar cité par Isna, parlant de Pavel Dourov, le cofondateur et PDG du réseau de messagerie.

Un constat également fait par les autorités russes qui, depuis mi-avril, ont imposé un blocage de Telegram après que le réseau eut refusé de fournir aux services fédéraux de sécurité (FSB) les clés permettant de lire les messages des utilisateurs.

Les autorités iraniennes ont également accusé Telegram d’avoir attisé la vague de contestation ayant touché des dizaines de villes d’Iran autour du Nouvel An en permettant la diffusion de messages insurrectionnels diffusés par des groupes en exil.

La promotion de messageries locales

Telegram revendique 40 millions d’utilisateurs en Iran, soit près d’un habitant sur deux. Le réseau, qui permet des communications cryptées, est utilisé au quotidien par des entreprises, des particuliers, des médias et des hommes politiques.

Le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, et le président Hassan Rohani ont fermé leur compte Telegram le 19 avril, en même temps que paraissait une directive interdisant à tous les organismes étatiques l’usage des applications de messagerie étrangères pour leurs communications extérieures. Contre Telegram, les autorités iraniennes cherchent à promouvoir des services de messagerie mis au point en Iran.