Donald Trump n’a pas pu assister, lundi 30 avril, à la présentation télévisée du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, centrée sur des renseignements collectés par le Mossad et prouvant – selon lui – le double jeu iranien sur le dossier du nucléaire. En effet, il recevait au même moment, et pour la première fois à la Maison Blanche, un responsable africain, le président du Nigeria, Muhammadu Buhari.

Au cours de la conférence de presse commune tenue au terme de leurs échanges, en début d’après-midi, le président des États-Unis a cependant montré qu’il avait été informé en amont du contenu de l’intervention de M. Nétanyahou. Les affirmations du premier ministre israélien ont alors donné à M. Trump l’occasion de critiquer une nouvelle fois un accord jugé « horrible ». « C’est un accord qui n’a pas été approuvé par beaucoup de monde », a-t-il assuré, en dépit du soutien unanime obtenu à l’époque par le compromis au Conseil de sécurité des Nations unies (ONU). Il a aussi assuré que « dans sept ans, cet accord aura expiré et l’Iran pourra », selon lui, « développer des armes nucléaires ».

« Ce n’est pas acceptable, sept ans c’est demain », a-t-il insisté. Le texte permet pourtant à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui orchestre en Iran la surveillance la plus rigoureuse de l’histoire de la prolifération nucléaire de vérifier pendant vingt ans le parc de centrifugeuses utilisées pour l’enrichissement, et pendant vingt-cinq ans la production de concentré d’uranium.

De fervents défenseurs de l’accord

M. Trump avait promis pendant la campagne présidentielle de « déchirer » cet accord. Il a tiré un premier coup de semonce en octobre en refusant de certifier, comme une loi américaine l’y invite, qu’il est conforme aux « intérêts de sécurité nationale » des États-Unis. Début janvier, il a ensuite fixé au 12 mai la date limite pour obtenir des améliorations qui semblent pour l’instant hors d’atteinte.

Tout en affichant leur inquiétude face des dossiers non-nucléaires, comme le programme balistique iranien et l’influence jugée déstabilisatrice de Téhéran au Proche-Orient, notamment au Yémen, en Syrie et au Liban, deux préoccupations sans cesse rappelées par Washington, les trois pays européens signataires (France, Allemagne et Royaume-Uni) campent en effet sur une ligne de grande fermeté à propos du texte de 2015.

Comme les autres signataires, russe, chinois et bien sûr iranien, ils jugent en effet impossible de réécrire unilatéralement le compromis obtenu laborieusement en 2015 après une campagne de sanctions particulièrement dévastatrices, notamment européennes. La semaine dernière, le président français, Emmanuel Macron, et la chancelière allemande, Angela Merkel, en visite à Washington, ont l’un comme l’autre plaidé pour les mérites du texte, tout en reconnaissant certaines lacunes.

Les velléités de M. Trump buttent également sur le Congrès américain. La franche hostilité de naguère vis-à-vis de ce texte a en effet fait place, au Sénat comme à la Chambre des représentants, à une défiance raisonnée. Une bonne partie des élus, notamment démocrates, qui avaient voté en 2015 contre le compromis, sans pour autant rassembler les voix nécessaires pour le bloquer, n’entend pas rompre l’accord et mettre en difficulté les relations des États-Unis avec leurs alliés, ainsi que la crédibilité de Washington.

« Un bon signal » à la Corée du Nord

La constitution d’une équipe de « faucons » autour du président, après l’entrée en fonction de John Bolton, son nouveau conseiller à la sécurité nationale, et la confirmation de Mike Pompeo au poste de secrétaire d’Etat, plaide pourtant en faveur d’une sortie américaine de l’accord. Elle a été pronostiquée par M. Macron au terme de sa visite, le 25 avril.

S’exprimant devant une commission du Sénat, le 26 avril, le secrétaire à la défense, James Mattis, a insisté lui aussi sur les vertus du compromis. « Je l’ai lu maintenant trois fois (…) et je dirai que c’est écrit presque avec l’hypothèse que l’Iran essaiera de tricher », a-t-il dit avant de juger le mécanisme de vérification « assez robuste ». M. Mattis s’est pourtant abstenu de répéter comme il le faisait auparavant que le texte est « dans l’intérêt des États-Unis ».

À la veille de sa prise de fonction, il y a un peu plus d’un an, le même homme avait jugé que « quand l’Amérique donne sa parole, [elle doit] la respecter ». Lundi, M. Trump a trouvé au contraire une vertu à un renoncement unilatéral des États-Unis : celle d’envoyer « un bon signal » à la Corée du Nord, à la veille d’un sommet avec Kim Jong-un qui devrait être essentiellement consacré au programme nucléaire de Pyongyang.