Certaines vidéos de tutoriels sur YouTbe ont été visionnées plusieurs millions de fois. / Capture d’écran YouTube

Il suffit de taper « slime » (« bave » en anglais) sur n’importe quel moteur de recherche pour se rendre compte de l’ampleur du phénomène. Vidéos de tutoriels visionnées des millions de fois, photos relayées sur Instagram et Twitter sous le mot-clé #slime… Cette pâte à malaxer gluante et visqueuse a été popularisée en 1984 par la sortie outre-Atlantique du film Ghostbusters, et de son redoutable fantôme vert fluo prénommé « Slimer ». Commercialisée par l’entreprise Mattel, la mixture a fait son grand retour en France l’an dernier parmi les enfants et les adolescents, qui la fabriquent désormais eux-mêmes à l’aide de différentes recettes trouvées sur Internet.

Des recettes artisanales, notamment à base de colle à papier et de lessive, qui ne sont pas sans danger, a mis en garde l’Agence nationale de sécurité sanitaire, l’Anses, dans un avis publié vendredi 4 mai. Depuis 2017, « plusieurs dizaines » de signalements d’effets secondaires liés au « slime » ont été « brutalement » remontés à l’Anses par les centres antipoison et le réseau de vigilance en dermato-allergologie, constate le professeur Gérard Lasfargues, directeur général délégué du pôle sciences pour l’expertise de l’agence.

« Certains conservateurs contenus dans la colle à papier liquide sont toxiques, et ont notamment produit atteintes à la peau, allergies et brûlures. Quant aux solvants également présents, ils provoquent des problèmes des voies respiratoires et peuvent atteindre le système nerveux central », énumère-t-il.

Toxique pour la fertilité et la reproduction

Les inquiétudes de l’agence se portent également sur l’une des composantes obligatoires de la mixture, l’acide borique ou borax, qui permet justement de donner à la pâte son caractère gluant et visqueux. On le retrouve notamment dans les liquides de lavage des lentilles de contact. « Cet élément chimique a été classé par la réglementation européenne comme toxique probable pour la fertilité et la reproduction, alerte le professeur Lasfargues. Il est particulièrement dangereux quand il est détourné de son usage habituel. »

Pour éviter que cette substance ait des effets sur les enfants, une directive européenne relative à la sécurité des jouets a d’ailleurs fixé « un taux maximal de migration » d’acides boriques de 300 milligrammes par kilogramme.

L’Anses s’est saisie du dossier dès la fin de 2017 avec la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), afin de faire contrôler les kits vendus dans le commerce. Deux kits dépassant les niveaux autorisés en acide borique ont d’ailleurs depuis été retirés du marché.

Selon le professeur Lasfargues, « il est encore trop tôt » pour se prononcer sur les effets à long terme du « slime » sur la santé. Toutefois, en attendant les premiers résultats du travail d’analyse de l’Anses, qui recense encore les différentes pathologies développées à son contact, l’agence « déconseille la manipulation quotidienne et répétée » de la substance fabriquée artisanalement.