Daniel Cordier, chez lui, à Cannes (Alpes-Martimes). / OLIVIER MONGE/MYOP POUR « LE MONDE »

Né en 1920 à Bordeaux, Daniel Cordier fut parmi les tout premiers volontaires à s’engager dans les Forces françaises libres, fondées par le général de Gaulle, en Angleterre, répondant ainsi à l’appel du 18 juin 1940. Elevé dans une famille monarchiste et nationaliste acquise aux idées de Charles Maurras, le fondateur de l’Action française, son obsession est alors de « tuer du boche », comme il le racontera plus tard. Affecté au Bureau central de renseignement et d’action, les services spéciaux de la France libre, il est parachuté en France, le 25 juillet 1942, puis recruté par Jean Moulin, le représentant personnel du général de Gaulle en zone libre, dont il devient le secrétaire.

Aux côtés de l’ancien préfet républicain révoqué par Vichy, Daniel Cordier assiste aux tumultueuses tractations qui visent à unir la Résistance intérieure et à la placer sous l’autorité du général de Gaulle. Un processus qui conduit à la création du Conseil de la Résistance, le 27 mai 1943, à Paris.

Après la mort de Jean Moulin, arrêté et torturé par les Allemands près de Lyon, au début de l’été 1943, Daniel Cordier poursuit son travail aux côtés de son successeur, Claude Bouchinet-Serreulles, avant de regagner l’Angleterre, via l’Espagne, au début de l’année 1944.

Ecrivain contre la calomnie

Après la guerre, Daniel Cordier devient galeriste et marchand d’art. Pendant plus de trois décennies, il se consacre entièrement à sa passion pour l’art, qu’il doit à ses conversations avec Jean Moulin pendant la période de l’Occupation, et se tient délibérément à l’écart des débats mémoriels et politiques autour de la guerre et de la Résistance.

Mais la parution, en 1977, d’un livre d’Henri Frenay, l’ancien chef du mouvement Combat, accusant Jean Moulin d’avoir été un agent communiste, le fait sortir de son silence. Jugeant l’accusation calomnieuse, Daniel Cordier décide alors de retracer le parcours de Jean Moulin, un travail colossal qui le conduira à consacrer plusieurs ouvrages volumineux à celui qu’il ne cessera d’appeler son « patron ». Parus dans les années 1980 et 1990, ces livres fondés sur une impressionnante masse d’archives écrites s’imposeront comme des références et vaudront à son auteur la reconnaissance des historiens de la période.

Aujourd’hui installé à Cannes (Alpes-Maritimes), Daniel Cordier continue de travailler à ses mémoires, dont le premier volume, consacré à la période allant jusqu’à l’arrestation de Jean Moulin, a connu un grand succès lors de sa sortie, en 2009 (Alias Caracalla, Gallimard). A 97 ans, il est l’un des sept derniers compagnons de la Libération (sur 1 038) encore en vie.