Le Leinster a remporté, samedi, la quatrième Coupe d’Europe de son histoire. / VINCENT WEST / REUTERS

Sale temps pour le Racing 92. Sale temps tout court, à Bilbao. Une pluie tenace à vous faire sortir le parapluie tout l’après-midi jusqu’au stade de San Mamés. La « cathédrale du football » (son surnom en Espagne) vient d’accueillir pour la première fois une finale de Coupe d’Europe de rugby. La deuxième dans l’histoire du Racing. Deux finales, deux défaites. Celle contre les Irlandais du Leinster (15-12), samedi 12 mai, succédant à celle d’il y a deux ans contre les Anglais des Saracens (21-9).

Il y a comme une constance dans ces échecs. La pluie et les blessures, d’abord, il faut bien le dire. Contre le Leinster, qui partait déjà favori (car invaincu en Coupe d’Europe cette saison), le club des Hauts-de-Seine a joué sans charnière. Ou plutôt, sans celle qu’il avait imaginée. Le demi de mêlée Maxime Machenaud ? Forfait depuis deux semaines après une rupture des ligaments croisés. L’ouvreur Pat Lambie, surtout ? Sorti après trois toutes petites minutes de jeu, sur une blessure au genou droit.

Quant à son remplaçant potentiel, Dan Carter, il a dû renoncer à toute présence sur la feuille de match juste avant le coup d’envoi : une histoire d’ischio-jambiers l’a contraint à un forfait express. Il y a deux ans déjà, alors titulaire dans le dispositif, le Néo-Zélandais avait défié les Saracens avec une blessure au mollet.

Les Franciliens peuvent s’en vouloir

La tentative ratée de Remi Tales dans les ultimes instants a scellé le sort de la partie. / GABRIEL BOUYS / AFP

Bien sûr, le Racing aura essayé sans Lambie, Machenaud et Carter. Bien sûr, le Racing aura mené au score. Très longtemps : 3-0 dès la 4e minute, 12-9 jusqu’à la 74e minute. Les supporteurs du Leinster, bloc bleu en net surnombre ce samedi, auront attendu la 78e pour voir leur équipe prendre l’avantage. Une énième pénalité à deux minutes de la fin, signée du capitaine Isa Nacewa, déjà là pour égaliser.

Le club des Hauts-de-Seine peut émettre des regrets. Autant Teddy Thomas et ses cavalcades avaient apporté la victoire contre le Munster en demi-finales, autant sa relance mal inspirée a précipité la défaite en finale. Rémi Talès aussi pourra s’en vouloir : il avait le drop de l’égalisation à portée de tir, en vain.

Avec un peu de cynisme, le club des Hauts-de-Seine peut aussi se réjouir. Il aura au moins encore un bel objectif la saison prochaine. Depuis l’accession de l’investisseur Jacky Lorenzetti à sa présidence, en 2006, le club centenaire a déjà entrepris avec succès plusieurs chantiers : remonter en première division (2009) ; remporter le championnat de France (2016, à Barcelone) ; emménager dans un nouveau stade (2017).

Un rugby de raccroc

Reste donc cette Coupe d’Europe qui se refuse toujours à lui, effrontée, et qui reste en France l’apanage de Toulouse (4 titres, record désormais égalé par le Leinster), Toulon (3 titres d’affilée) et de Brive (1 titre). Un horizon toujours indépassable pour le club des Hauts-de-Seine, en attendant la prochaine finale prévue à Newcastle dans un an.

Autant souhaiter aux « Geordies » un peu plus de spectacle qu’en ce froid après-midi espagnol. Les organisateurs voulaient exporter le rugby hors de son pré ovale et avaient choisi l’Espagne à cette fin, quitte à décorer les poteaux aux couleurs de l’ikurina, le drapeau de l’Euskadi. Pourquoi pas. Après tout, même le quotidien local El Correo s’est pris au jeu du rugby, à la « une » de son édition de samedi. Sans parler des bars à pintxos (les tapas locales) et autres commerces ayant fait apparaître de subreptices objets ovales. Un ballon géant s’élevait même suspendu dans les airs, sous le regard de la statue de José Antonio Aguirre, figure du gouvernement basque (1936-1960).

Mais encore aurait-il fallu, sur le terrain, que les deux équipes pratiquent autre chose qu’un rugby de raccroc : incapables d’inscrire le moindre essai, Leinstermen comme Racingmen ont fait progresser le score à la seule force de leurs pieds, à grands coups de pénalités : cinq pour les Irlandais (dont trois de l’ex-Racingman Johnny Sexton), quatre pour les Français (tous de la doublure Teddy Iribaren). Cette vérité avait peut-être quelque chose de prédictible, sur cette pelouse de San Mamés que s’apprêtent à retrouver les footballeurs de l’Athletic Bilbao.