Noël Mamère, lors du congrès de Génération.s, au Mans, en décembre 2017. / JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP

L’ancien député écologiste plaide pour une candidature commune entre Générations.s et Europe Ecologie-Les Verts (EELV) aux élections européennes qui se dérouleront en mai 2019.

Vous n’êtes plus ni député ni maire depuis juin 2017. Avez-vous tourné le dos à la politique ?

Non, j’écris des documentaires et je travaille aux liens entre Génération.s et Europe Ecologie-Les Verts. Dans la perspective des européennes, il faut travailler à ce rapprochement ! Je n’imagine pas une seconde qu’il puisse y avoir deux listes. Il faut créer les conditions d’une liste commune aux européennes qui soit le préalable à une nouvelle entité politique.

Pourriez-vous conduire la liste de cette nouvelle entité politique ?

J’ai été sollicité par des amis écologistes qui m’ont dit « ce serait bien que tu sois tête de liste ». C’est un peu compliqué pour moi de dire oui alors que j’ai commencé mon retrait de toute fonction élective en politique. On dit qu’il faut du renouvellement, il faut donc se l’appliquer à soi-même. Après, on peut toujours réfléchir, et si je peux rendre service, je le ferai.

Pourquoi vouloir retourner en politique alors que vous l’aviez quittée ?

La politique est une drogue dure. En 2017, je me suis arraché la double perfusion de député et de maire. Mais je n’étais pas « en descente », je m’étais préparé ! Il est urgent que les gauches se réveillent. J’ai envie de me mêler de ce qui me regarde, c’est-à-dire la politique, cela peut passer par des fonctions électives, mais pas seulement… Et je ne suis pas demandeur. Mais je garde ce goût pour le combat politique. On ne baisse pas les bras devant une telle crise écologique aux conséquences sociales et environnementales sans précédent.

Vous avez été député pendant vingt ans, vous n’incarnez pas vraiment le renouvellement…

C’est ce qui me désole et qui flatte mon amour-propre en même temps : ils cherchent des gens, mais à chaque fois ça finit sur moi.

Avez-vous discuté de l’hypothèse de votre candidature avec Benoît Hamon ?

Non. Je dois le voir la semaine prochaine, mais je ne lui en parlerai pas. Cela doit venir de lui. Il semblerait que ce soit une hypothèse qu’il envisage. En tout cas, s’ils ont besoin de moi, j’irai. Mais, je le répète, à la condition que nous ne présentions qu’une seule liste. Et cela peut également être en position non éligible.

Pour le moment, la direction d’EELV ne parle pas d’alliance avec Génération.s…

Il y a une tendance à vouloir partir seuls. Ils s’imaginent qu’ils vont refonder tout seuls l’écologie politique, mais il n’y a pas d’autre solution que de s’allier. On ne va pas tirer le rideau de l’écologie politique maintenant !

Il y a beaucoup d’eurodéputés sortants chez Génération.s et EELV qui espèrent être réélus, ce que compliquerait une liste de « renouvellement ». Qu’en pensez-vous ?

Il faudra leur dire non. J’ai conduit cinq listes aux municipales, heureusement que je n’ai pas reconduit tous ceux qui étaient là depuis 1989. C’est comme ça qu’on gagne ! La logique politique ne s’impose pas toujours aux responsables politiques, le problème des ego est vieux comme la politique.

Quels sont vos rapports avec Jean-Luc Mélenchon ?

Ils sont peu fréquents. Ils étaient bons jusqu’à l’épisode du Média [Noël Mamère a quitté le pure player de la gauche radicale en février, après l’éviction de sa rédactrice en chef]. La France insoumise aurait bien aimé que je les rejoigne à la présidentielle, mais je n’avais aucune raison de le faire : mon candidat était Benoît Hamon. Jean-Luc Mélenchon m’envoyait des SMS pour me dire : « Regarde les sondages, rejoins-nous ! ». Mais trop de sujets nous séparent : l’Europe, la question de la souveraineté, du travail, notamment l’enjeu du revenu universel, le rapport aux régimes dirigistes, l’analyse de la situation syrienne et la proximité avec la Russie…

Pourquoi l’unité de la gauche est-elle au point mort ?

Le comportement de Jean-Luc Mélenchon contribue à assécher la gauche, car il n’accepte aucune discussion. Il se considère comme l’incarnation du peuple. Il domine aujourd’hui, mais il domine sur un tas de ruines. Il est le roi du cimetière. Il y a une tombe bien fleurie, c’est celle de La France insoumise, mais le reste est à l’abandon. Je ne me résous pas à un Lider Maximo qui règne sur ce qu’il reste de la gauche. Cela empêche toute reconstruction pour une véritable alternative au techno-capitalisme incarné par Emmanuel Macron.

Comment jugez-vous la première année d’Emmanuel Macron à l’Elysée ?

Emmanuel Macron prend de sérieux risques en affaiblissant de manière systématique les corps intermédiaires et en menant une politique libérale qui s’adresse principalement aux plus nantis. Avec la SNCF, il veut avoir « sa » réforme comme Thatcher ou Reagan, mais ce n’est pas aussi simple, cette entreprise appartient au patrimoine français.

Malgré le mouvement social, le gouvernement ne semble pas prêt à reculer…

Il y a des médicaments à « effet retard ». Le 26 mai, il n’y aura pas forcément une « marée humaine », mais cela ne signera pas pour autant une victoire d’Emmanuel Macron. La politique se fait sur le long terme. « Et, monté sur le faîte, il aspire à descendre », écrivait Corneille dans Cinna. Mais je ne le souhaite pas pour la France, car un échec de Macron constituerait un risque grave avec la montée des populismes et de l’extrême droite.