Aries, une rate saisie par la fourrière et recueillie par l'association Larkencielle, le 4 mai 2018. / Association Larkencielle

Ceux qui sont entrés dans la pièce ont eu la surprise de leur vie. Ils savaient bien que la femme expulsée de son logement insalubre ce jour-là avait des animaux, et qu’il faudrait les récupérer, comme toujours en pareil cas. Mais là… ce n’est pas un chien ou quelques chats que les employés de la fourrière animale départementale de Gennevilliers, dans les Hauts-de-Seine, découvrent derrière la porte, fin d’avril. A la place, des rats en nombre incroyable. « Environ 200 », selon la première évaluation. Le chiffre réel, après comptage, se révèle encore plus effrayant : 266 rats se trouvaient entassés dans une petite pièce insalubre !

Il y avait des mâles et des femelles, des nouveau-nés, tous laissés en liberté. Des blancs, des gris, des noirs. Quelques blessés, présentant des abcès ou des plaies. « Ils étaient à la merci des chats et des chiens qui passaient de temps en temps en croquer un ou s’amuser avec d’autres », précise un employé appelé à la rescousse. L’occupante du logement s’était visiblement laissée dépasser. « La misère sociale est le quotidien de ceux qui s’occupent de protéger les animaux », commente un professionnel.

Le SOS de la fourrière pour ces animaux de compagnie

« Cette saisie est hors norme », reconnaît-on à la Sacpa, la société qui gère la fourrière animale de Gennevilliers. L’opération de sauvetage qui suit n’est pas moins exceptionnelle. Car il n’est pas question de tuer tous ces rats, considérés comme des animaux de compagnie. Ni de les garder à Gennevilliers, dont les locaux ne sont pas adaptés aux rongeurs. Leur propriétaire ne pouvant pas les reprendre non plus, la Sacpa lance un SOS.

Le lundi 30 avril, elle sollicite toutes les associations s’occupant de protection des animaux en Ile-de-France. Objectif : trouver au plus vite un point de chute pour tous ces rats, sauf ceux jugés trop mal en point, et euthanasiés. « Nous en avons pris dix, six mâles et quatre femelles », témoigne Marie-Laure Caron, responsable du refuge de la SPA à Plaisir (Yvelines). L’Arche de Bagherra, à Méréville (Essonne), en a sauvé d’autres.

Vela, l’un des rats récupérés lors de la saisie record. / Association Larkencielle

Les bénévoles de Larkencielle, un refuge de Nanterre (Hauts-de-Seine) spécialisé dans les rats, ont recueilli à eux seuls quarante-huit rongeurs. « En règle générale, nous prenons cinq ou dix rats dans les saisies, mais, face à une situation pareille, nous nous sommes débrouillés », raconte Cédric Mevrel, l’un des piliers de l’association. Tous les rats ont été examinés par un vétérinaire, traités pour éliminer les parasites, puis placés quinze jours en quarantaine afin de vérifier qu’ils n’étaient malades. Des mâles ont été castrés. Une cagnotte a permis de réunir un financement d’urgence.

L’étape suivante, encore en cours, consiste à trouver une famille d’accueil à chacun. « Ce n’est pas si difficile, assure Cédric Mevrel. Au premier abord, on imagine de grosses bestioles très sales. Mais quand on s’occupe d’eux, les rats sont des animaux adorables, intelligents, aussi affectueux que les chiens et propres que les chats. Ils vous font des léchouilles et peuvent même reconnaître leur nom. » Sur les quarante-huit rats repris par Larkencielle, seuls trois sont morts, et une vingtaine a déjà trouvé preneurs.