Tramway reliant Chatillon (Hauts-de-Seine) à Velizy-Villacoublay (Yvelines) / ERIC PIERMONT / AFP

A l’approche de la présentation du projet de loi d’orientation des mobilités, nous appelons de nos vœux la reconnaissance d’un droit à la mobilité pour tous, intégrant formation et accompagnement, afin de permettre à tous de pouvoir se déplacer.

En France, en 2018, plus de sept millions de personnes en âge de travailler, soit 20 % de la population active, rencontrent des difficultés pour se déplacer. Pendant plus de cinquante ans, l’Etat et les collectivités locales ont développé une offre massive de transports en commun, adaptés au plus grand nombre, développé des axes routiers, permettant développement économique, désenclavement des territoires et une plus grande autonomie individuelle.

Cette démarche était nécessaire. Pourtant aujourd’hui une personne en insertion sur deux a déjà refusé un travail ou une formation pour des problématiques de mobilité. Et le budget moyen des Français pour la mobilité, de 5 000 euros par an en moyenne, s’accroît et place une partie de la population, en particulier celle qui est dépendante de la voiture individuelle, en situation de vulnérabilité.

Notre manière de penser les déplacements doit évoluer afin de garantir la capacité à chacun de se déplacer au quotidien : le droit à la mobilité.

Cette notion permet d’engager une réorientation fondamentale de la politique de transport en nous extrayant de l’obsession de l’infrastructure, pour nous concentrer sur les besoins de l’usager. Il s’agit d’accompagner chacun pour lui permettre d’effectuer tous ses déplacements nécessaires, par tout moyen, et de manière intermodale. Ce saut qualitatif devient possible dès lors que l’individu est placé au centre de la législation et des politiques de mobilité.

L’objectif central de cette démarche est de disposer d’une mobilité autonome et durable, à travers un accompagnement personnalisé ou une formation dès le plus jeune âge, à l’école par exemple. Les freins à la mobilité sont multiples : physiques, économiques, matériels, cognitifs ou encore psychologiques et culturels. Accès à un véhicule par le biais d’un prêt ou d’un microcrédit, formation aux transports en commun, à la sécurité routière pour les jeunes ou les seniors… Soyons audacieux afin de généraliser de telles solutions à l’échelle nationale et rendre ainsi la mobilité inclusive !

Un service public de la mobilité inclusive

Ce droit à la mobilité doit surtout être garanti par un maillage pertinent du territoire avec des « plates-formes de mobilité ». L’objectif de ces plates-formes est double. Pour les publics, il est d’évaluer et d’accompagner vers la ou les solutions de mobilité les plus adaptées. Pour les territoires, de coconstruire et de fédérer une offre de services, en s’appuyant sur les transporteurs historiques et en accompagnant le développement de services innovants.

A Helsinki et Göteborg, mais aussi à Saint-Etienne ou Montargis, l’ensemble de l’offre de transport public et collectif (bus, tram, métro) comme privé et individuel (taxis, VTC, vélo ou voiture partagés) se retrouve en une seule offre de transport accessible par le biais d’une application numérique. Ces avancées technologiques doivent être accessibles à tous, et en tout point du territoire. La fracture territoriale doit trouver des réponses dans le numérique, afin que les exclus d’aujourd’hui ne soient plus ceux de demain.

Former, informer, doivent être les missions premières du service public de la mobilité ! Les outils ainsi que les nouvelles solutions de mobilité doivent être conçues avec et pour les personnes les plus exclues afin de les rendre intuitives et accessibles. Une solution conçue pour les personnes les plus fragiles est une solution conçue pour tous.

Une centaine de plates-formes de mobilité sont déjà actives sur le territoire. Certaines, ouvertes à l’initiative de Wimoov, sont principalement à destination des publics en insertion et aux seniors, et accompagnent près de 11 000 personnes avec un taux de maintien ou de retour dans l’emploi ou la formation de 46 %.

Il est nécessaire de doter chacune des zones d’emplois d’une plate-forme de mobilité. Ce service public pourrait être coordonné à l’échelon régional, en partenariat avec l’Etat, afin de concilier égalité dans l’accès aux services publics et réalités des territoires.

Florence GILBERT, directrice générale de Wimoov, membre fondateur du Laboratoire de la mobilité inclusive (LMI) ; Audrey PULVAR, présidente de la Fondation pour la nature et l’homme (FNH) ; Bruno MARZLOFF, sociologue ; Marc FONTANES, expert en mobilité ; Eric LE BRETON, sociologue ; Olivier SCHNEIDER, président de la Fédération des usagers de la bicyclette (FUB) ; Luc BROUSSY, président de France Silver Eco ; Bruno GAZEAU, président de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (FNAUT) ; Arnaud LEROY, président de l’ADEME ; Alain ROCHON, président de l’APF France Handicap.