Le président vénézuélien Nicolas Maduro lors d’un meeting de campagne à Caracas, le 17 mai. / Ariana Cubillos / AP

Un peu plus de 20 millions de Vénézuéliens sont appelés à élire, dimanche 20 mai, leur président parmi trois candidats. Une élection dont l’issue ne fait guère de doute, l’opposition à Nicolas Maduro, qui vise la réélection, ayant renoncé à participer au scrutin.

La date du vote, initialement prévue pour décembre 2017, a été reportée à deux reprises et le futur président héritera d’une situation économique très critique – 1,7 million de personnes ont fui le pays depuis deux ans en raison de l’hyperinflation et des pénuries de produits de première nécessité.

Touché par l’effondrement des cours du brut depuis 2014, le Venezuela, qui tire 96 % de ses revenus du pétrole, souffre d’un manque de devises qui l’a plongé dans une crise aiguë. En cinq ans, le PIB a fondu de 45 % selon le FMI, qui anticipe une contraction de 15 % en 2018 et une inflation de 13 800 %.

  • Qui sont les trois candidats ?

Le président socialiste sortant, Nicolas Maduro, successeur d’Hugo Chavez depuis sa mort en 2013, brigue un second mandat au nom du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV). Malgré son taux d’impopularité record grimpant à 75 %, sa victoire reste l’hypothèse la plus probable. Durant son mandat, l’inflation a drastiquement augmenté et les pénuries alimentaires se sont généralisées. Pour résorber cet effondrement économique, il a promis lors de sa campagne de gagner la « guerre économique » menée selon lui par les Etats-Unis et l’opposition.

Ancien membre du PSUV, Henri Falcon, du parti Avanzada Progresista (Avancée progressiste), occupe la deuxième place dans les intentions de vote. Même si les sondages demeurent peu fiables en raison du taux d’abstention potentiellement plus important que d’habitude, certains d’entre eux le placent en tête. Il compte sur une forte participation des opposants au président sortant pour l’emporter. Cet avocat, ancien directeur de campagne de l’opposant Henrique Capriles lors des élections de 2013 et gouverneur de l’Etat de Lara de 2008 à 2017, s’est peu à peu éloigné du chavisme prôné par Nicolas Maduro.

Le candidat à la présidentielle Henri Falcon, lors d’un rassemblement de campagne le 17 mai. / Julio Colmenarez / AP

Dans une tribune publiée dans le New York Times, le candidat justifie sa décision de se présenter malgré le boycott d’une partie importante de l’opposition : selon lui, « les boycotts électoraux ne résolvent rien. Les forces d’opposition qui abandonnent les compétitions électorales ne font que […] permettre aux dirigeants en place de consolider leur pouvoir ».

Peu connu des électeurs, Javier Bertucci, le troisième candidat, provient de la société civile : homme d’affaires et pasteur évangélique, il s’oppose fermement à l’avortement légal et à l’adoption chez les couples homosexuels. Son discours, empreint d’une rhétorique religieuse, a toutefois peu de chances de le porter à la victoire, d’après les sondages.

  • Pourquoi la principale force d’opposition boycotte-t-elle le scrutin ?

La coalition de la Table de l’unité démocratique (MUD), principale force politique opposée à Nicolas Maduro, a décidé de ne pas participer à l’élection, arguant que le gouvernement ne lui a pas donné de garanties suffisantes quant à l’organisation du scrutin.

Le Comité national électoral du Venezuela a fixé unilatéralement la date des élections, malgré l’absence d’accord entre le gouvernement de Nicolas Maduro et la coalition. La MUD réclamait entre autres la présence d’observateurs internationaux « indépendants », la désignation d’un conseil national électoral « équilibré », le vote des Vénézuéliens de l’étranger et un égal accès aux médias.

En outre, la plupart des principaux responsables politiques issus de cette coalition ont été empêchés de se présenter. Henrique Capriles, l’adversaire du président sortant lors des précédentes élections, a été banni en 2017 de tout mandat politique pour une durée de quinze ans, pour cause d’« irrégularités administratives ». Cette mesure a été qualifiée par la MUD de manœuvre politique pour faire taire les voix dissonantes. Leopoldo Lopez, autre figure de l’opposition, condamné à 14 ans de prison puis assigné à résidence en 2017, a été privé de ses droits civiques.

  • Comment réagit la communauté internationale ?

Les Etats-Unis, l’Union européenne, le Canada, le Japon et certains pays d’Amérique latine ont d’ores et déjà annoncé qu’ils ne reconnaissaient pas l’élection, Washington la jugeant même « ni libre, ni juste ». Dans un communiqué datant du 14 mai, les représentants de dix pays d’Amérique latine, membres du groupe de Lima, accompagnés de l’Espagne et des Etats-Unis, ont demandé une nouvelle fois la suspension des élections du 20 mai, en fustigeant le « régime autoritaire » de Nicolas Maduro.

Le Trésor américain a même annoncé le 7 mai avoir pris des sanctions contre une vingtaine d’entreprises, dont seize installées au Venezuela, et contre trois personnes dont un ancien directeur du service vénézuélien des renseignements financiers.

Emmanuel Macron, à travers un communiqué de l’Elysée à la suite de sa rencontre avec une délégation de l’opposition vénézuélienne le 4 avril, a également « rappelé que les conditions d’organisation de l’élection présidentielle au Venezuela, le 20 mai, ne permettaient pas, en l’état, un scrutin juste, libre et transparent ».

La crise au Venezuela expliquée en 5 minutes
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