Ce devait être un « mariage entre égaux ». « Personne ne rachète personne ! », avait même assuré Bruno Lafont, alors patron de Lafarge. Quatre ans après l’annonce de la fusion entre le champion français du ciment et son rival suisse Holcim, cette fiction a définitivement pris fin.

Vendredi 25 mai, le numéro un mondial du ciment doit annoncer son intention de fermer le siège parisien du groupe, ont indiqué au Monde des sources concordantes, confirmant des informations de Reuters. Les représentants du personnel doivent être avertis dans la journée. Ce geste éminemment symbolique devrait se traduire par la suppression de centaines d’emplois. Et désormais, tout le pouvoir sera concentré en Suisse.

Depuis la fusion, LafargeHolcim disposait de deux sièges, l’un rue des Belles-Feuilles, dans le 16e arrondissement de Paris, l’autre en Suisse. Les équipes étaient partagées entre les deux localisations. Tout l’audit interne et les services chargés de la santé et de la sécurité se trouvent dans l’ancien siège de Lafarge, de même qu’une partie des responsables de la communication, des ressources humaines, ou encore de la direction juridique.

Déficit spectaculaire en 2017

Un fragile équilibre menacé depuis plusieurs semaines. En mars, à l’occasion de la présentation des résultats annuels, le nouveau patron du groupe, le Suisse Jan Jenisch, n’avait pas caché qu’il s’interrogeait sur le maintien de deux sièges. Tout en dévoilant d’importantes pertes, le directeur général avait alors annoncé de premières mesures d’économie, dont la fermeture de ses sièges régionaux de Singapour et Miami. « Rien n’est encore décidé concernant Paris », assurait alors LafargeHolcim.

La réorganisation en passe d’être dévoilée ce vendredi ne porte pas que sur le siège historique de Lafarge, ces 12 000 mètres carrés où travaillent 200 à 300 personnes. En Suisse, LafargeHolcim pourrait transférer des postes de son siège de Zurich vers la ville de Holderbank, où Holcim avait ouvert sa première cimenterie en 1912, ainsi que vers le bureau de Zoug.

En 2017, LafargeHolcim a essuyé une perte nette de 1,7 milliard de francs suisses (1,5 milliard d’euros), après un bénéfice de 1,8 milliard en 2016. Ce déficit spectaculaire s’explique par l’opération vérité lancée sur les comptes du groupe après le départ de ses anciens dirigeants, le Français Bruno Lafont et l’Américain Eric Olsen. Les deux hommes ont été emportés notamment à la suite du scandale syrien, révélé par Le Monde, Lafarge étant accusé d’avoir financé des groupes terroristes pour maintenir l’activité de sa cimenterie de Jalabiya, dans le nord de la Syrie, au début des années 2010.