Zinédine Zidane est entré dans l’histoire, en remportant trois Ligues des champions en trois ans avec le Real. / LLUIS GENE / AFP

« Ce n’est pas normal d’être en finale pour la troisième fois d’affilée. » C’est Zinédine Zidane qui le disait après les demi-finales, et on peut légitimement penser qu’il sait de quoi il parle. Pas normal, a fortiori, de remporter la compétition trois fois de suite. Après la victoire du Real Madrid (3-1) contre Liverpool, samedi 26 mai, Zidane est devenu à 45 ans le premier technicien à réaliser l’exploit, lui qui n’est entraîneur principal d’un club professionnel que depuis deux ans et demi. C’est simple : depuis ses débuts d’entraîneur en 2016, Zinédine Zidane n’a jamais été éliminé en Ligue des champions.

En faisant rentrer Gareth Bale, auteur d’un incroyable but 122 secondes après son entrée en jeu puis d’un deuxième but décisif, il a encore une fois prouvé son talent. Il a aussi montré qu’il pouvait compter sur sa bonne étoile, qui semble toujours tout faire basculer en sa faveur. De la blessure de Mohamed Salah après 30 minutes à la double bourde invraisemblable du gardien de Liverpool Loris Karius, tout a souri au Real.

Même la sortie sur blessure de Dani Carvajal n’a pas entamé la confiance des Espagnols, capables de laisser passer l’orage avant d’assommer leurs adversaires.

Bale redonne l'avantage au Real d'un sublime retourné
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Machine à gagner

Dans l’exceptionnelle armoire à trophée de Zidane, on trouve aussi une quatrième Ligue des champions obtenue depuis le banc, aux côtés de son mentor Carlo Ancelotti dont il était adjoint en 2014. Et une cinquième, en tant que joueur, décrochée d’une sublime reprise de volée en 2002, encore et toujours avec le Real Madrid. « Je le vis normalement, parce qu’il faut que je vive cela normalement » expliquait-il en conférence de presse avant le match.

Mais peut-on vraiment croire le placide entraîneur qui vient d’entrer, un peu plus, dans la légende de son sport ? Vingt ans après sa première incursion dans les livres d’histoires, grâce à deux coups de tête en finale de Coupe du monde. Douze ans après un coup de sang contre l’Italie qui a refermé le chapitre du Zidane joueur, talentueux et impulsif. Devenu discret pendant les premiers temps de sa retraite, puis studieux lors de son apprentissage de son nouveau métier, le voici d’un calme olympien, sur le banc d’une machine à gagner.

Tout habitué qu’il soit, le technicien français était presque sans voix après le match, au moment de livrer ses premières impressions :

« C’est un truc de fou de vivre ça. Même si on y croit et on y pense, et qu’on sait qu’avec une équipe comme ça on peut aller loin, gagner trois fois d’affilée c’est un truc de fou. C’est fantastique. »

FRANCK FIFE / AFP

Sa troisième saison aux commandes du Real a pourtant été la moins simple. Convaincu de la force de son effectif, avec lequel il a su tisser des liens forts, bien aidé par l’aura naturelle dont il dispose, il n’a presque rien changé.

Victime d’une crise d’efficacité de son attaque, avec un Cristiano Ronaldo presque muet en début de saison, le technicien a vu, inexorablement, le rival barcelonais s’envoler vers un titre de champion. Très vite, le mot d’ordre de la saison est devenu « La ligue des champions ou rien ». Inévitable lorsqu’on entraîne le club aux douze trophées en C1, même lorsqu’on s’appelle Zidane et qu’on a la toute confiance de son président, pourtant pas timide lorsqu’il s’agit de se séparer d’un entraîneur.

Pas inquiet, le Français a gardé son cap, serein comme toujours, ambitieux aussi, gardant toute confiance en ses joueurs. Pour la première fois de l’histoire, les onze titulaires de la finale de la Ligue des champions étaient les mêmes que ceux de la saison passée. Mais c’est du banc qu’est venue la solution, grâce à un formidable Gareth Bale déjà buteur en finale, en 2014. Sur le banc, dans l’ombre d’Ancelotti, Zidane était déjà là.

Se souviendra-t-on du Real de Zidane comme du Milan de Sacchi, double vainqueur en 89-90, ou du Barça de Guardiola (2009, 2011) ? C’est tout le paradoxe du règne de Zidane, technicien pragmatique par excellence, qui a fait du froid réalisme un credo. Peu d’idées de jeu révolutionnaires, pas de grand chambardement d’effectif.

Simplement des joueurs parmi les meilleurs du monde, un effectif rodé qui bouge peu et une capacité à élever le niveau de jeu dans les moments importants qui fait ressembler cette équipe à une machine dénuée d’émotions, qui s’engouffre dans la moindre faiblesse adverse. Liverpool peut en témoigner.