Pour la première fois, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) a intégré, mercredi 30 mai, le trafic de drogue dans le calcul du produit intérieur brut (PIB). Selon l’Insee, le trafic de drogue en France génère une activité évaluée à près de 2,7 milliards d’euros par an. Cela représente un peu plus de 0,1 point de PIB.

Sur ces 2,7 milliards, 1 milliard d’euros sont générés par le trafic de cannabis et 800 millions d’euros par le trafic de cocaïne, précise l’Insee dans une note inédite.

Après plusieurs années de débat, l’Institut national de statistiques avait annoncé à la fin de janvier qu’il intégrerait à partir de la fin du mois de mai la consommation de stupéfiants et les activités liées à cette consommation dans le PIB français.

« Un risque de sous-estimation »

Selon l’Insee, qui s’appuie sur les données de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), elles-mêmes basées sur des enquêtes auprès des ménages, la consommation de drogue en France pèse 3,1 milliards d’euros par an. Mais près de 400 millions d’euros doivent être retirés de ces 3,1 milliards, correspondant au poids des importations – qui doivent être comptabilisées dans le PIB des pays concernés et non dans le PIB français.

D’où le chiffre de 2,7 milliards avancé par l’Insee. « Ce chiffre est une évaluation », insiste cependant Ronan Mahieux, responsable du département des comptes nationaux de l’Institut :

« Il y a un risque de sous-estimation, car il est possible que les ménages n’aient pas confiance dans les enquêteurs qui les contactent. »

En 2013, l’institut européen des statistiques Eurostat avait demandé aux Etats membres de l’Union européenne d’intégrer le trafic de drogue et la prostitution dans leurs statistiques nationales, estimant qu’il s’agissait de transactions commerciales consenties librement.

L’objectif était d’harmoniser les données fournies par les pays européens, ces activités étant considérées comme légales dans certains Etats, à l’image des Pays-bas, ce qui gonfle leur PIB, et illégales dans d’autres.

La prostitution exclue du PIB

A la suite de la demande d’Eurostat, la plupart des pays européens ont intégré ces nouvelles normes ces dernières années. Ce nouveau système de compte s’est traduit par des révisions à la hausse du PIB parfois sensibles dans ces pays, notamment en Italie et en Espagne.

Mais l’Insee précise dans sa note avoir refusé de comptabiliser la prostitution dans le PIB, contrairement à d’autres pays européens :

« La prostitution exercée dans la rue est notoirement le fait de personnes généralement en situation irrégulière, souvent mineures et sous la coupe de réseaux clandestins qui les ont acheminées en France. »

Pour cette raison, « ces situations s’apparentent davantage à une forme d’esclavage sexuel qu’à l’exercice librement consenti d’une activité professionnelle », ajoute l’organisme public.