L’avis du « Monde » – pourquoi pas

Depuis deux décennies, le cinéma iranien édifie un monument à la condition de la femme sous le régime de la République islamique. Réalisé en 2015, Les Rives du destin traite, contrairement à ce que son titre absurde pourrait laisser penser, d’un aspect particulier du sort des femmes iraniennes : ce qui attend les divorcées après la séparation.

S’inspirant de l’histoire de sa sœur cadette, le réalisateur suit – après un prologue qui ne laisse aucun doute sur l’issue de cette errance – les pas de Samira qui revient à Téhéran, qu’elle avait quitté pour Damghan, au nord de l’Iran, après son divorce. Son ex-mari l’attend à la gare pour la rudoyer et la remettre dans le train. La jeune femme, incarnée par Taraneh Alidoosti, que l’on a vue dans A propos d’Elly et Le Client, d’Asghar Farhadi, résiste et tente de reprendre pied dans la capitale.

Economie informelle

Le ton à la fois résigné et indigné, l’interdiction que s’impose le réalisateur de laisser passer le moindre souffle d’air dans l’atmosphère confinée que respire son héroïne rendent parfois pénible le spectacle des Rives du destin.

La personnalité du film tient moins à la dénonciation du patriarcat qu’à la description presque documentaire de l’économie informelle de Téhéran. Samira tente de constituer le pécule qui lui sera nécessaire pour vivre avec sa fille en aidant un ami à écouler un stock de décodeurs contrefaits. Minutieusement, Abdolreza Kahani décrit chaque étape de cette entreprise minable, menacée à chaque instant d’être mise en faillite par l’intervention des autorités. C’est dans cette peinture, que complète celle de la vie de désœuvré que mène l’ex-mari de Samira, qu’on trouvera quelques points d’appui pour résister à l’infini (et probablement justifié) pessimisme des Rives du destin.

LES RIVES DU DESTIN Bande Annonce (2018)
Durée : 02:04

Film iranien d’Abdolreza Kahani. Avec Taraneh Alidoosti, Babak Hamidian, Reza Attaran (1 h 15). Sur le Web : bluebird-films.com