Le secrétaire américain au commerce, Wilbur Ross, le 14 mai, à Washington. / CHIP SOMODEVILLA / AFP

Le monde peut bien regarder de travers l’administration américaine et sa politique commerciale. Peu importe à Wilbur Ross. Invité à intervenir, mercredi 30 mai, à la grande réunion annuelle de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le secrétaire au commerce des Etats-Unis s’est montré fidèle à sa réputation : sans états d’âme ni fausse pudeur pour défendre l’offensive protectionniste lancée par le président Donald Trump.

« Tout pays a l’obligation de protéger ses citoyens et ses moyens de subsistance. C’est peut-être un point de vue populiste, mais il nous tient à cœur », a, d’emblée, déclaré ce milliardaire qui a fait fortune en rachetant et en restructurant des entreprises en difficulté dans l’acier, le textile ou l’automobile.

Le contexte est un peu particulier : dans moins de quarante-huit heures, les Etats-Unis doivent dire s’ils imposent des taxes à hauteur de 25 % sur leurs importations d’acier, et de 10 % sur celles d’aluminium. L’Europe, vent debout, réclame une exemption définitive, sans plus vraiment oser l’espérer. Faute de quoi, prévient-on à Bruxelles, il ne sera plus question de négocier. M. Ross hausse un sourcil : « Il n’y a que l’Union européenne qui insiste sur le fait qu’on ne peut pas discuter si ces tarifs sont mis en place. Avec la Chine, c’est différent : ils veulent bien continuer à négocier. »

Bruxelles rangée dans le même sac que Pékin

Bruxelles rangée dans le même sac que Pékin par son partenaire transatlantique : voilà qui est un peu fort pour les participants européens à la réunion de l’OCDE. « Faut-il vous rappeler que nous n’avons pas les mêmes pratiques commerciales que la Chine », a répondu Sigrid Kaag, ministre du commerce extérieur des Pays-Bas et invitée du même panel que M. Ross.

Ce dernier ne s’en émeut guère, très occupé à énumérer ses griefs contre le système multilatéral. « Oui, nous avons une liste de doléances assez longue », a-t-il insisté. L’Organisation mondiale du commerce ? « Tout le mécanisme de règlement des différends prend des années. Il ne sert à rien : ceux qui ont été lésés doivent obtenir des réparations beaucoup plus vite », a-t-il reproché. Oubliant de signaler, au passage, que les Etats-Unis bloquent, depuis des mois, la nomination de nouveaux juges au sein de cet organe judiciaire, ralentissant encore davantage son fonctionnement.

« Le ciel ne va pas tomber sur la tête des Etats-Unis »

Quant au forum sur les surcapacités dans l’acier, on y parle trop et on n’y agit pas assez : « En un an et demi, il y a eu sept réunions et aucun résultat décisif. » D’ailleurs, « c’est tout le problème avec le libre-échange, les gens en parlent beaucoup, mais sans vraiment le pratiquer. Aux Etats-Unis, nous avons un sentiment d’urgence. »

Mais une hausse unilatérale des droits de douane ne risque-t-elle pas de porter tort à l’économie américaine ? Visage impassible, le secrétaire au commerce balaie ces objections. « Le ciel ne va pas tomber sur la tête des Etats-Unis parce que des tarifs seront ajoutés, assène-t-il. Je n’ai entendu parler d’aucune usine automobile ou de boîte de conserve qui puisse fermer, c’est ridicule. » Parole de celui que Wall Street a longtemps surnommé… « le roi de la faillite ».