Député, ses révélations sur l’opacité du budget de l’Elysée en avaient fait une personnalité politique respectée. Aujourd’hui retiré de la vie parlementaire, René Dosière, élu socialiste à l’Assemblée nationale pendant vingt-cinq ans, a décidé de poursuivre son combat en faveur de plus de transparence et de déontologie de la vie politique. Jeudi 31 mai, il lancera l’Observatoire de l’éthique publique, think-tank qui aura pour vocation de reprendre le flambeau et de formuler des propositions pour lutter contre les zones d’ombres de la République.

Connu dans le milieu politique, on sait moins que ses investigations ont aussi abondamment nourri les chercheurs, et en particulier certains juristes. C’est le cas de Matthieu Caron, directeur général de cet Observatoire. « J’ai beaucoup écrit sur ses travaux », explique le maître de conférences de droit public à l’université de Valenciennes. Quand M. Dosière lui annonce son intention de mettre un terme à sa vie parlementaire, les deux hommes réfléchissent à une manière de poursuivre dans le sens de ses travaux. Ainsi est née l’idée de ce think-tank, rassemblant des universitaires mais aussi des parlementaires de tous bords politiques. « L’idée est de poursuivre le travail que j’ai effectué de manière artisanale et d’en faire une petite entreprise », explique M. Dosière.

« L’idée n’est pas de jeter le discrédit sur les élus »

Leurs travaux auront une double fonction : d’abord, continuer à investiguer sur la transparence dans les institutions, du gouvernement aux cabinets ministériels, du Parlement aux collectivités territoriales, mais aussi la justice, les partis, l’administration. Pour cela, l’entremise des députés sera précieuse, ces derniers ayant accès à plus d’informations que les chercheurs dans les coulisses du pouvoir. Les parlementaires disposent également de la possibilité de poser des « questions écrites » au gouvernement « C’est l’un des outils beaucoup utilisés par René Dosière pour avoir des réponses » rappelle M. Caron. Les instigateurs du think-tank nourrissent l’ambition que l’ancien élu puisse transmettre aux députés une partie des techniques qu’il a utilisées afin d’obtenir des réponses.

Actuellement, une trentaine d’universitaires et une quinzaine de parlementaires sont montés à bord, dont une députée La République en marche, Laurianne Rossi, par ailleurs questeure de l’Assemblée nationale, qui sera la vice-présidente de l’Observatoire. « L’idée n’est pas de recréer un Anticor ou Transparency international, ni d’être un organe militant mais d’être un laboratoire d’idées », précise l’élue des Hauts-de-Seine. Leurs travaux devraient donner lieu à la formulation de propositions de nouvelles mesures pour, dans la continuité de la loi pour la transparence de la vie publique, de 2013, ou la loi de moralisation adoptée l’été dernier, améliorer la législation en matière d’éthique politique. Tous les ans, un colloque sera par ailleurs organisé pour faire le bilan sur les questions de transparence dans l’un des domaines d’enquête. Le premier sera consacré au Parlement et aura lieu les 25 et 26 octobre.

Au moment de lancer ce think-tank, ses initiateurs restent cependant très prudents sur la manière de présenter l’initiative. Chez les élus et dans le débat public, les questions de transparence sont devenues des étendards autant que des repoussoirs. « L’idée n’est pas de jeter le discrédit sur les élus ou la haute fonction publique », insiste René Dosière. L’Observatoire de l’éthique publique se veut ainsi « pour une philosophie de la transparence tranquille et constructive ». « Ce qui nous tient à cœur, c’est de restaurer la confiance politiquement, pas la défiance », abonde Matthieu Caron.