Longtemps éclipsée par les premiers grands chantiers du quinquennat, la future réforme des retraites se profile à l’horizon. Six semaines après le début des discussions avec les syndicats, le gouvernement a lancé jeudi 31 mai une « consultation citoyenne » sur la question. Les grandes orientations de la future réforme sont quant à elles attendues fin 2018 ou début 2019. Le point sur un chantier tentaculaire.

Sur quoi Emmanuel Macron s’est-il engagé ?

« Nous créerons un système universel des retraites où un euro cotisé donne les mêmes droits, quel que soit le moment où il a été versé, quel que soit le statut de celui qui a cotisé », affirmait, sur son site, le candidat d’En marche ! pendant la présidentielle. Derrière cette formulation, il s’agit notamment de mettre fin aux différents régimes spéciaux qui existent aujourd’hui. « Nous ne toucherons pas à l’âge de départ à la retraite, ni au niveau des pensions », écrivait également le candidat dans son programme.

L’idée est que tout citoyen alimente une forme de compte virtuel tout au long de sa vie active à chaque fois qu’il cotise (y compris lorsque ces cotisations sont prises en charge par l’Etat, par exemple, pour les périodes de chômage). Au moment de prendre sa retraite, les droits accumulés sont traduits en une pension, selon un coefficient de conversion calculé à partir de l’âge de départ en retraite et de l’année de naissance.

Selon la formule promue par Emmanuel Macron, le système des retraites resterait « un régime par répartition », où ce sont les cotisations des actifs qui financent les pensions de leurs aînés. Pas question non plus de modifier les droits de « ceux qui sont à moins de cinq ans de la retraite ». Le futur chef de l’Etat évoquait pendant la campagne une transition « progressive, sur une période d’environ dix ans », précisant que « la réforme ne commencera à s’appliquer qu’au cours de la législature suivante », soit après 2022.

Où en est la mesure ?

Emmanuel Macron a rappelé cette promesse d’aboutir à un « système universel » dans son entretien télévisé sur BFM-TV et Mediapart, le 15 avril, affirmant qu’il n’y aura « plus de régimes spéciaux » de retraites, puisque ces derniers convergeront dans « dix ans » environ. Le gouvernement a précisé le calendrier envisagé dans la foulée : huit mois de concertation sont prévus et la réforme pourrait être « votée en 2019 ».

C’est Jean-Paul Delevoye, haut commissaire à la réforme des retraites, qui pilote, pour l’heure, les négociations. Il a commencé à recevoir dix organisations syndicales salariales et patronales, qui sont consultées sur six grandes thématiques d’ici à la fin de l’année.

Le site Participez.reforme-retraite.gouv.fr doit également permettre aux citoyens de donner leur avis à partir du jeudi 31 mai et jusqu’au 25 octobre. Les principaux enjeux de la réforme pourront y être discutés, tels que l’âge de départ à la retraite ou les inégalités femmes-hommes.

Derrière un principe simple, une réforme beaucoup moins consensuelle qu’elle n’en a l’air

« Plus simple », « plus égalitaire », « plus transparent »… Les grandes lignes de la réforme prônée par la communication gouvernementale sont plutôt consensuelles. Le détail des discussions pour passer du système actuel au nouveau l’est, en réalité, beaucoup moins.

Malgré la volonté de formuler une règle de calcul universelle, il faudra bien que celle-ci prenne en compte de nombreuses situations spécifiques. On peut citer les congés maternité, les périodes de maladie, la prise en compte de la pénibilité ou les possibilités de cotiser à des taux différents. « Tout ça est à discuter », reconnaissait Emmanuel Macron, le 15 avril, évoquant, par exemple, la possibilité de majorer les droits des pompiers volontaires.

Quel que soit le détail des arbitrages, il devrait bien y avoir à l’arrivée des gagnants (ceux dont la situation sera mieux valorisée par la nouvelle formule) et des perdants (ceux pour qui les anciennes règles étaient plus favorables). Parmi les cas potentiellement litigieux, on trouve celui des fonctionnaires, dont la retraite est aujourd’hui calculée sur les six derniers mois de fonction. Supprimer cette règle sans compensation sur les salaires en cours de carrière plomberait, de fait, les retraites d’une partie des intéressés.

Par ailleurs, le futur système des retraites devrait, dans les grandes lignes, inciter à retarder l’âge de départ à la retraite pour bénéficier d’une pension plus élevée. D’autant plus que l’espérance de vie devrait être prise en compte dans le calcul dans le coefficient de conversion. Une manière de retarder l’âge de départ à la retraite sans y contraindre les salariés.

La complexité de cette réforme, ajoutée au fait qu’elle touche la future retraite de dizaines de millions de Français, en fait un dossier particulièrement sensible.