L’usine avait arrêté la production des laits en poudre et des produits infantiles le 8 décembre – ici, l’usine de Craon, en Mayenne. / FAUSTINE VINCENT / « LE MONDE »

Elle était fermée depuis six mois. L’usine Lactalis de Craon, en Mayenne, au cœur de l’affaire de lait infantile contaminé aux salmonelles à la fin de 2017, a discrètement repris sa production dimanche avec des tests, a fait savoir jeudi 31 mai le porte-parole du groupe Michel Nallet, confirmant une information des Echos :

« Il n’y a aucune commercialisation des produits, il s’agit de tests sur de la poudre de lait pour adulte et non infantile. Ces tests sont contrôlés par les services de l’Etat. »

A la fin de 2017, 38 nourrissons avaient été atteints de salmonellose après avoir consommé un produit pour enfant, essentiellement de marque Milumel ou Picot, sorti de l’usine de Craon. Le processus de retrait avait été chaotique et de nombreux dysfonctionnements ayant mené à la contamination ont été mis à jour. Après plusieurs semaines de crise, le groupe avait retiré à la mi-janvier la totalité de ses laits infantiles produits dans l’usine.

Une enquête judiciaire est en cours, ainsi qu’une commission d’enquête parlementaire qui doit auditionner le 7 juin le président-directeur général de Lactalis, Emmanuel Besnier.

« Toute la production consignée »

En février, M. Besnier avait annoncé vouloir redémarrer d’ici à la fin du premier semestre l’une des deux tours de séchage touchées et relancer ses marques de lait infantile.

Après des tests techniques de remise en route conduits dimanche, « la vraie production a démarré lundi en début de semaine, sachant que tout ce qui est produit est consigné, bloqué sous contrôle de Lactalis, ça n’a pas le droit d’être mis sur le marché », a précisé Fany Molin, porte-parole de la Direction générale de l’alimentation (DGAL), dépendant du ministère de l’agriculture.

La consigne des produits doit permettre de « conduire des inspections sur l’établissement pour voir comment il fonctionne, quelles sont les procédures qui ont été mises en place », a-t-elle précisé. Des inspections physiques de l’établissement sont notamment conduites par des agents de l’Etat.

Doivent suivre des prélèvements de poudre de lait pour adultes et des prélèvements dans l’environnement par les services de l’Etat, analysés par un laboratoire officiel, ainsi que des autocontrôles environnement et produits par Lactalis, toujours selon Mme Molin. Ce nouveau plan d’autocontrôles, « considérablement renforcé, doit permettre de déterminer des niveaux de contamination beaucoup plus faibles que le plan qu’il y avait avant », a-t-elle assuré, ajoutant :

« Si tous ces éléments sont convergents pour montrer qu’il y a une maîtrise du risque sanitaire de la part de l’opérateur, on pourra envisager de faire un redémarrage de fabrication de poudre de lait infantile, [dans un délai de] quelques semaines. »

Les familles de victimes en colère

L’usine avait arrêté la production des laits en poudre et des produits infantiles le 8 décembre, selon Lactalis qui emploie 327 salariés. La tour de séchage no 1 de l’usine de Craon, contaminée par les salmonelles, a été définitivement fermée. La tour no 2 est, elle, en phase de test.

Jeudi, l’Association des familles de victimes s’est « s’offusqu[ée] d’une telle décision » :

« Comment l’usine peut-elle redémarrer en toute discrétion alors qu’aucune explication officielle n’a été donnée sur les causes de la contamination aux salmonelles depuis 2005 ? »

L’association réclame « l’arrêt immédiat de la production ». « L’Etat semble avoir cédé à la pression de Lactalis en autorisant une remise en production sans avoir pu déterminer les causes de cette contamination », a-t-elle déploré.