A l’aciérie Salzgitter AG, à Salzgitter (Basse-Saxe), en 2016. / Fabian Bimmer / REUTERS

« Ce n’est pas une bonne journée pour les relations transatlantiques », a résumé Olaf Scholz, ministre allemand des finances, jeudi 31 mai au soir depuis Vancouver, avant une rencontre avec son homologue américain. L’annonce par Washington de l’instauration de taxes sur l’acier et l’aluminium en provenance de l’Union européenne, du Mexique et de la Chine, jeudi, a consterné les milieux politiques et économiques allemands. Si le pays s’y attendait depuis longtemps, la mesure constitue un tournant dans l’histoire des relations germano-américaines. L’allié américain, qui avait tant œuvré pour la reconstruction économique de l’Allemagne après la seconde guerre mondiale, s’attaque au fondement même de sa prospérité : le libre-échange.

La chancelière Angela Merkel a qualifié les mesures d’« illégales », jeudi soir, tout en alertant sur le risque d’un envenimement de la situation. Le ministre de l’économie, Peter Altmaier, a prévenu que ces droits de douane allaient provoquer « beaucoup de dégâts économiques », même si les conséquences négatives de ces mesures toucheraient les Etats-Unis « bien plus tôt et bien plus fortement » que l’Europe. « Ce n’était pas une décision avisée », a-t-il déclaré, jeudi soir, à la chaîne publique ARD, tout en recommandant de « garder la tête froide » et de reprendre les négociations pour garantir des relations commerciales équilibrées.

« Nous allons tous y perdre »

« Les conflits commerciaux ne connaissent pas de gagnant », a rappelé le ministre des affaires étrangères, Heiko Maas. Du côté des industriels, l’amertume était palpable : « Nous allons tous y perdre : le consommateur américain, les entreprises européennes et même le site de production américain », a déploré Eric Schweitzer, président des chambres de commerce et d’industrie.

Quelles seront les conséquences de cette décision pour l’économie allemande ? Selon les économistes, elles devraient être limitées à court terme. « Mais il est à craindre que nous ne soyons qu’au début d’une série de mesures américaines », redoute Gabriel Felbermayr, directeur de l’institut économique de Munich IFO.

Pour l’économie allemande, la mise à exécution de la menace du président américain, Donald Trump, d’imposer à 25 % les importations de véhicules de luxe européens, qui toucherait de plein fouet les constructeurs allemands, serait, par exemple, bien pire. Selon les calculs de l’IFO, la mesure pourrait coûter 5 milliards d’euros à l’Allemagne, soit 0,16 % de son produit intérieur brut. Jeudi, une phrase attribuée au président américain avait suscité la panique dans les milieux économiques. Selon le magazine WirtschaftsWoche, M. Trump aurait déclaré au président français, lors de sa visite en avril, qu’il poursuivrait sa politique économique « jusqu’à ce qu’il n’y ait plus une seule Mercedes sur la Ve Avenue à New York ».