L’assouplissement de la loi littoral, prévu dans le cadre du projet de loi logement, a donné lieu à de vifs débats dans la nuit du jeudi 31 mai au vendredi 1er juin à l’Assemblée, gouvernement et majorité se défendant d’être des « bétonneurs » face aux critiques de l’opposition.

Entamées tardivement, les discussions sur cet article du texte Evolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) issu d’un amendement La République en marche (LRM) introduit il y a deux semaines en commission ne sont toutefois pas allées à leur terme.

L’article entend notamment permettre, au cas par cas, le « comblement des dents creuses », des parcelles vides situées entre deux bâtiments construits dans un même hameau, une mesure contestée par les associations de défense de l’environnement.

« Quelques ajustements »

Des élus de la majorité ont récusé toute volonté d’« affaiblir la loi littoral », assurant à l’instar d’Eric Bothorel (LRM, Côtes-d’Armor) qu’il n’y a pas d’un côté « ceux qui veulent bétonner et ceux qui veulent sanctuariser ».

Alain Perea (LRM, Aude), a notamment dit avoir vécu avec « beaucoup de difficulté » d’être accusé de « vouloir bétonner ». « S’il y a quelques ajustements, qu’on ne nous accuse pas d’être des bétonneurs », a-t-il lancé. « Qu’on ne nous dise pas que nous détricotons [la loi] ou que c’est une révolution », a abondé Jimmy Pahun (MoDem).

Elue de Gironde et membre de la commission du développement durable, Sophie Panonacle (LRM) a défendu de son côté le texte de référence pour protéger les littoraux « particulièrement fragiles », rappelant que « 1 212 communes » sont concernées. « Nous abîmerions nos littoraux en acceptant des dérogations même partielles », a-t-elle plaidé, jugeant qu’il serait « malvenu d’envisager une densification de l’urbanisation ».

Gilles Lurton (Les Républicains, Ille-et-Vilaine), qui a évoqué le « cri qui monte de la France entière pour préserver » les littoraux, a aussi estimé que s’il faut toucher à cette loi, « il ne faut le faire que d’une main tremblante ». Reconnaissant « quelques effets pervers qu’il faut corriger » notamment sur les dents creuses, il a estimé, comme son collègue Thibault Bazin (LR, Meurthe-et-Moselle), que le texte, tel que rédigé « ne semble pas assurer cette nécessaire protection » des littoraux.

Pas d’étude d’impact

A gauche, plusieurs élus ont invité le gouvernement à éviter toute « précipitation », face à une mesure qui revient à « ouvrir la boîte de Pandore » et ce sans étude d’impact, selon les termes du socialiste François Pupponi (Val-d’Oise). « Ne touchez pas à la loi littoral ! », a lancé Eric Coquerel (LFI, Seine-Saint-Denis), tandis que le communiste Pierre Dharréville (Bouches-du-Rhône) a exhorté le gouvernement à ne pas « prendre cette responsabilité ».

L’élu corse Jean-Félix Acquaviva (non inscrit) a aussi appelé les députés à être « des sentinelles » de cette loi de 1986, arguant que « nous ne sommes pas dans un monde de bisounours, les forces de l’argent sont toujours là ».

Plusieurs élus (PS, LFI et des élus corses) ont cherché en vain à supprimer l’article, leurs amendements de suppression étant rejetés par 44 voix contre 17. Le ministre de la cohésion, des territoires, Jacques Mézard, s’y est opposé, comme le rapporteur Richard Lioger (LRM, Moselle) qui a défendu un amendement « utile ». « Je tiens à réaffirmer qu’il ne s’agit aucunement pour le gouvernement de porter atteinte à la loi littoral », a assuré M. Mézard, insistant sur le fait que le gouvernement « n’a aucunement l’intention de faciliter la bétonisation de nos côtes » et appelant à « revenir aussi à la réalité ».

Il ne s’agit pas non plus de considérer que les textes sont « intangibles » et voir « ce qui peut être amélioré » a-t-il ajouté, promettant via des amendements à venir de « clarifier de manière assez nette » cette position.