GitHub, dont le siège est basé à San Francisco, a officiellement vu le jour en 2008. / Github

C’est un achat considérable : après plusieurs jours de rumeurs, Microsoft a annoncé lundi 4 juin l’acquisition pour 7,5 milliards de dollars de la plateforme GitHub, dont le siège social est basé à San Francisco. Si ce nom reste encore inconnu pour beaucoup d’internautes, il désigne pourtant l’un des sites les plus visités au monde. En une décennie d’existence, il est devenu un outil incontournable pour les développeurs informatiques, qu’ils soient indépendants ou employés des grandes entreprises de la Silicon Valley.

  • A quoi sert GitHub ?

GitHub permet aux développeurs de stocker et partager, publiquement ou non, le code qu’ils créent. La plate-forme accueille ainsi, dit-elle, plus de 80 millions de projets, qu’il s’agisse de logiciels, de sites Web, d’applications mobiles ou tout autres types de programme informatique – et quel que soit le langage de programmation utilisé.

Le site est aussi un espace collaboratif : chaque utilisateur peut contribuer aux projets mis en ligne publiquement sur GitHub, en proposant des modifications. Le succès de GitHub repose notamment sur la façon dont le site a facilité ce processus : pour que les utilisateurs ne se dérangent pas mutuellement en modifiant un programme en même temps, ils téléchargent chacun de leur côté le code sur leur ordinateur, effectuent les modifications, qui sont ensuite publiées sur GitHub après validation. Le site se base pour cela sur Git, un outil développé en 2005 par Linus Torvalds, le célèbre créateur de Linux – GitHub aura eu pour talent de rendre ce système plus simple d’utilisation et compréhensible par le plus grand nombre.

Chaque modification du code est ainsi stockée sur GitHub, et il est possible de suivre pas à pas chaque étape de développement d’un programme. Des espaces de discussion permettent à tous les développeurs d’échanger sur chaque programme et contribution.

  • Pourquoi GitHub est-il devenu si important ?

La plate-forme revendique pas moins de 27 millions d’utilisateurs – ce qui représente une bonne partie des développeurs informatiques du monde. GitHub est aussi bien utilisé par des développeurs indépendants que par de grandes entreprises comme Google, Apple, Facebook ou encore Amazon, qui s’en servent pour bâtir leurs propres produits. Sa facilité d’utilisation a aussi conquis des développeurs amateurs, qui y publient leurs projets. Pour un développeur, exister sur GitHub est devenu incontournable : les recruteurs y scrutent leurs profils et leurs contributions davantage que leur CV. GitHub ferait partie des sites les plus populaires du monde, selon le classement Alexa.

Surtout, GitHub est devenu la plus grande bibliothèque de code « open source » au monde – c’est-à-dire du code rendu public, accessible à tous. Au point que le magazine de référence Wired, spécialisé dans les technologies, l’avait comparé en 2015 à la bibliothèque d’Alexandrie :

« GitHub est plus qu’un endroit pratique où stocker des fichiers en ligne. C’est la pierre angulaire du développement informatique – un entrepôt incontournable de code open source et un espace de connaissance essentiel. »

Cette centralisation provoque aussi des inquiétudes : que se passerait-il si GitHub était compromis ? En janvier, la plate-forme a d’ailleurs été la cible d’une des plus puissantes attaques par déni de service (DDoS) jamais enregistrées – une action visant à saturer un site Web de requêtes pour le rendre inaccessible. GitHub a relativement bien résisté : il a subi des perturbations pendant une dizaine de minutes avant un retour à la normale. Toutefois, le code de la plupart des projets étant téléchargé par les utilisateurs, et donc stocké sur leurs ordinateurs, la disparition de GitHub ne signerait pas automatiquement celle de ces projets – mais tout de même de leurs archives, de leurs évolutions et des innombrables discussions les entourant.

  • Quel est son modèle économique ?

Si les développeurs peuvent utiliser gratuitement GitHub pour leurs projets en open source, ils doivent en revanche payer pour leurs projets privés, dont le code n’est pas rendu public. Les abonnements basiques vont de 6 à 18 euros par mois et par utilisateur. Par ailleurs, GitHub vend aussi la possibilité, pour des entreprises, d’utiliser son système sur leurs propres serveurs. En revanche, la plate-forme n’affiche pas de publicité.

  • Quel est l’intérêt pour Microsoft d’acheter GitHub ?

Après avoir longtemps été la figure de proue des logiciels propriétaires, et s’être mis à dos les innombrables développeurs défenseurs de l’open source, cet achat pourrait sembler contre-nature. Microsoft est pourtant extrêmement présent sur GitHub, et l’un de ses projets open source, l’éditeur de code Visual Studio Code, est celui qui rassemble le plus de contributeurs sur la plate-forme.

Depuis l’arrivée de Satya Nadella à la tête de Microsoft en 2014, l’entreprise s’est davantage tournée vers les outils destinés aux développeurs et, de concert, vers l’open source. Quand elle a « ouvert » le code de sa famille d’outils. NET, la même année, Microsoft l’a publié sur GitHub plutôt que sur Codeplex, son propre site de partage de code en open source – qu’elle a depuis fermé.

En achetant GitHub, Microsoft parfait cette stratégie en direction des développeurs, et dispose désormais d’un vaste écosystème d’outils leur étant destinés. L’entreprise devient donc incontournable pour les développeurs du monde entier. Reste à voir ce qu’elle compte faire précisément de GitHub, et comment elle compte l’inclure dans cet écosystème. Cette acquisition pourrait ouvrir la voie à de nouveaux liens entre la plate-forme et d’autres services de Microsoft, comme par exemple son offre de « cloud » Azur, qui livre une guerre sans merci contre son rival Amazon Web Services.