Série sur Canal+ Séries à 21 h 55
Documentaire sur Netflix à la demande

Pose (FX) Trailer HD - Evan Peters, Kate Mara series
Durée : 01:31

En 1991 était récompensé par le Grand Prix du jury au Festival du film de Sundance, aux Etats-Unis, Paris Is Burning, un film documentaire de Jennie Livingston tourné à partir de 1987 dans le circuit new-yorkais des « bals » sous forme de concours de travestis, transformistes, drag-queens et femmes transgenres.

Aujourd’hui, grâce à des émissions de télévision fameuses comme le concours de télé-réalité pour transformistes « RuPaul’s Drag Race » (« RPDR »), qui s’inspire beaucoup de ces bals, ce phénomène, ses usages, ses lieux (les dancings de Harlem et les jetées de l’Hudson), son vocabulaire (que détaille point par point Paris Is Burning) et ses catégories sont connus d’un public qui dépasse largement – du moins aux Etats-Unis – la communauté LGBTQ.

Quatre des dix saisons de « RPDR », menées par la plus célèbre drag-queen nord-américaine, RuPaul (de son vrai nom Ru Paul Charles, qui joue également en homme dans certains films et séries), sont disponibles, comme Paris Is Burning, sur Netflix.

Ce transgénérisme a connu une visibilité grandissante depuis le lancement, en 2014, de la série Transparent, de Jill Soloway, dont le personnage principal, Mort Pfefferman, est un universitaire, père de famille à la retraite, qui décide de devenir Maura, une femme transgenre.

Paris is Burning clip (1991)
Durée : 04:57

A cela s’ajoute le coming out de l’ancien champion olympique Bruce Jenner, qui a décidé d’étaler au grand jour son changement de genre et de prénom par une émission de télé-réalité qui n’aura duré que deux saisons, I Am Cait (« Appelez-moi Caitlyn »en français, 2015-2016).

Très critiquée en raison de son statut de riche privilégiée (et pour ses opinions politiques : elle a soutenu Donald Trump, puis s’en est désolidarisée), Caitlyn Jenner aura cependant tenu à faire intervenir des intellectuelles et activistes transgenres comme Jennifer Finney Boylan et Kate Bornstein. Elle a aussi donné la parole à des associations, notamment celles s’occupant des mineurs. C’est dans ce contexte que Ryan Murphy, toujours aussi prolifique – comment fait-il ? – propose une nouvelle série, Pose, diffusée aux Etats-Unis sur la chaîne FX et, dans la foulée, par Canal+ Séries en France.

Sous la coupe d’une « mère »

Pose prend comme source manifeste les lieux, décors et personnages du film de Jennie Livingston, en reproduisant presque à l’identique certaines séquences de Paris Is Burning. A travers le portrait de quelques femmes transgenres et d’un jeune danseur homosexuel afro-américain, chassé par sa famille, Murphy et ses deux cocréateurs, Brad Falchuk et Steven Canals, rendent hommage à celles et à ceux qui peuplaient ces bals du vendredi soir.

Ils ont pour ce faire assemblé une distribution constituée de très nombreuses actrices – professionnelles ou non – transgenres. Une première qui tranche avec la situation de Transparent, dont la créatrice avait été critiquée pour avoir confié le rôle principal à un homme cisgenre.

Les diverses composantes LGBTQ se retrouvent dans ces dancings car, comme le dit un personnage de Pose : « Ce sont les seuls endroits où sont acceptés ceux dont on ne veut pas ailleurs. » Dans Paris Is Burning, le travesti Dorian Corey disait : « C’est une drogue, mais une drogue qui ne vous fera pas de mal. »

Regroupés en « maisons » sous la coupe d’une « mère », les participants pauvres économisent ou volent pour se fournir en vêtements extravagants, présentés lors de « catégories » pendant le bal (qui accueillent aussi des garçons non travestis), tandis que d’autres, plus rares, profitent de leur relation avec un homme hétérosexuel riche pour porter des vêtements de marque.

Evan Peters incarne Stan dans la série « Pose ». / FOX/PARI DUKOVIC

Ainsi, Evan Peters, acteur fétiche de Murphy, incarne le genre de Sugar Daddy (« papa gâteau ») décrit par certains transsexuels – c’est ainsi qu’ils sont nommés dans Pose et Paris Is Burning, comme cela se faisait avant que le terme « transgenre », plus exact, ne soit adopté.

Le sida, dont les ravages étaient déjà terribles en 1987 (date à laquelle commencent Paris Is Burning et Pose), est présent dans les deux programmes. Ainsi que la drogue, la prostitution, à laquelle se livraient, comme le précise un intervenant de Paris Is Burning, « 90 % des drag-queens » et femmes transgenres pour survivre.

Les quatre premiers épisodes de Pose semblent vouloir retrouver l’esprit festif de Glee (2009-2015), une autre série de Ryan Murphy (on y danse et on y chante beaucoup), tout en préservant une sérieuse dose de vérité dramatique.

Dans Paris Is Burning, cette vérité est d’autant plus poignante que tous les intervenants principaux du film sont morts peu après, assassinés ou victimes du sida.

Pose. Série créée par Ryan Murphy, Brad Falchuk et Steven Canals. Avec MJ Rodriguez, Indya Moore, Dominique Jackson (EU, 2018, 7 × 54-58 min.) épisode 1, mercredi 6 juin à 21 h 55 sur Canal+ Séries. Paris Is Burning, de Jennie Livingston. Avec Pepper LaBeija, Venus et Angie Xtravaganza (EU, 1991, 76 min). Sur Netflix à la demande.