Léger contretemps pour la loi sur les « fake news ». Alors que son adoption devait intervenir jeudi 7 juin, elle a finalement été repoussée à plus tard – sûrement en juillet – car tous les amendements déposés n’ont pas encore été étudiés. Après huit heures de discussion, la séance a été levée à 1 heure du matin.

Ces deux propositions de loi – ordinaire, et organique pour la présidentielle – visent à permettre à un candidat ou parti de saisir le juge des référés pour faire cesser la diffusion de « fausses informations » durant les trois mois précédant celui d’une élection nationale. Elles imposent aux plateformes (Facebook, Twitter, etc.) des obligations de transparence lorsqu’elles diffusent des contenus contre rémunération.

Moteurs de ces textes, annoncés par Emmanuel Macron début janvier, « les tentatives de déstabilisation, notamment de l’extérieur » par « la diffusion virale de fausses informations », selon la rapporteuse de la loi, Naïma Moutchou (La République en marche). La Russie a ainsi été accusée d’ingérence lors de la présidentielle aux Etats-Unis mais aussi en France.

Difficile définition des « fake news »

Mais l’opposition, que ce soit à droite ou à gauche, craint une « atteinte à la liberté d’expression » alors que « l’arsenal législatif existe » déjà. Mme Moutchou a d’ailleurs fait voter une nouvelle définition de « fausse information » : « Toute allégation ou imputation d’un fait, inexacte ou trompeuse, constitue une fausse information. » Mais la ministre de la culture, Françoise Nyssen, a jugé sa portée trop générale et a dit espérer que la navette avec le Sénat permettra une définition « plus satisfaisante ».

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L’opposition a alors pu souligner la « confusion » et « l’impréparation » de la majorité. « Depuis toujours, c’est une grande dispute que celle des apparences et de la vérité », a lancé en début de soirée le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, convoquant Socrate, Platon ou Camus. « Pensez-vous que cette loi (…) puisse être mise entre toutes les mains », a demandé, pour sa part, Hervé Saulignac pour le Parti socialiste. Elsa Faucillon, du Parti communiste a quant à elle évoqué, notamment, « le risque de judiciariser le débat politique ». Du côté des Républicains, Constance Le Grip a jugé « l’enfer pavé de bonnes intentions », avec « le risque de voir des allégations qualifiées de “fake news” par le juge [se révéler] fondées quelques jours plus tard ».