La Coupe du monde et le ballon officiel de l’édition 2018. / AGE / Photononstop / AGE / Photononstop

Ça y est, c’est le grand jour. Dans l’après-midi du jeudi 14 juin, Russes et Saoudiens s’affontent pour l’ouverture de la Coupe du monde 2018, entamant la compétition la plus attendue – et suivie – de la planète. Qui dit suivie, dit supporteurs aux quatre coins du globe, attendant le coup de sifflet inaugural. Et puisque les 64 rencontres du Mondial russe ne se dérouleront pas toutes en soirée – en raison du décalage horaire et de la programmation –, certains d’entre vous risquent de vous retrouver au travail lors des matchs.

Ainsi, pour s’en tenir à la France, la première rencontre des Bleus est programmée à midi (heure de Paris) et les deux suivantes à 17 heures (France-Pérou) et 16 heures (Danemark-France). Et si France-Australie se déroule le samedi 16 juin, ce qui devrait éviter de se poser la question de le regarder au travail pour la majorité d’entre vous, il n’en va pas de même avec les autres rencontres. Et nombre de salariés entendent combiner travail et passion : un écran pour travailler et un autre pour garder un œil sur le match en cours. Mais quelles sont les règles ?

  • A-t-on le droit de regarder un match au travail ?

A moins d’avoir pour métier une spécialisation requérant que vous voyiez la rencontre (dans un milieu sportif ou du journalisme), regarder un match de football est un loisir. Et dans ce cas, vous n’avez pas à l’immiscer dans votre environnement professionnel.

« Le principe, c’est que le salarié est là pour travailler, et doit y consacrer tout son temps à son travail, explique l’avocate au barreau de Caen, Nathalie Lailler. Il doit l’exercer de bonne foi. On est payé par quelqu’un pour exécuter un travail, et on y consacre tout son temps. » Et la spécialiste en droit du travail de préciser que « le fait de consacrer son temps de travail à une autre activité personnelle est susceptible d’entraîner une sanction pour le salarié ». Ce type de sanction allant de l’avertissement au licenciement, dans le pire des cas, en passant par le blâme ou la mise à pied.

Par ailleurs, si vous utilisez du matériel de l’entreprise – un ordinateur, par exemple – pour suivre la rencontre, le droit français autorise votre employeur à connaître les sites sur lesquels vous vous êtes connectés, et combien de temps. A condition, cependant, que les employés aient été prévenus de l’existence de ce moyen de contrôle.

A moins qu’un règlement intérieur le spécifie, votre ordinateur peut se transformer en télévision sur votre temps de pause. Mais la durée de deux mi-temps d’un match risque fortement d’excéder ce temps.

« D’accord, allez-vous rétorquer, du coup si je regarde les matchs sur ma tablette, qui n’a pas été fournie par l’entreprise, je suis couvert. » Bien pensé, mais pas si vite.

  • Peut-on consulter un live sur son mobile ?

Indépendamment de votre ordinateur, vous souhaiterez peut-être suivre l’évolution du score sur un direct – comme celui du Monde – relatant la rencontre. Et utiliserez en cela votre téléphone personnel. Dans ce cas précis, « la jurisprudence à propos des connexions de manière générale, que ce soit sur téléphone, Twitter, Internet... est très fluctuante », relate Nathalie Laillier. Tout dépendra de la régularité avec laquelle vous aurez recours à cet outil annexe. Et de votre propension à exécuter la tâche pour laquelle vous êtes payé.

  • Que risque-t-on si on le fait ?

A de très rares exceptions, vous ne risquez pas votre emploi si vous regardez un match de la Coupe du monde. Mais tout dépend de votre emploi. Un employé de la sécurité d’un grand magasin a été licencié lors de la précédente Coupe du monde pour avoir détourné une caméra de sécurité vers une télévision retransmettant les rencontres. Mais son jugement estime que non seulement il n’a pas rempli ses obligations de travail, mais qu’il a de plus, ce faisant, affaibli le dispositif de sécurité de l’entreprise.

« L’employeur risque d’avoir une réponse sous forme d’un avertissement ou d’une sanction disciplinaire, souligne Nathalie Lailler. Mais de là à licencier la personne pour ça... Il faudra prouver aux juges la proportionnalité de la sanction. » Aussi, un rappel à l’ordre ou un avertissement sont plus probables, si l’acte est isolé et que le salarié n’a pas posé de problèmes par le passé ayant justifié des sanctions disciplinaires.

Si d’aventure vous suivez certaines rencontres depuis votre bureau – et dans l’hypothèse où vous n’avez pas posé de congés en fonction des matchs et que votre entreprise n’a pas organisé la diffusion de la rencontre pour fédérer les équipes – mais faites votre travail, vous ne devriez pas risquer de perdre votre emploi. « Néanmoins, précise l’avocate spécialiste en droit du travail, une personne qui regarde un match de foot au travail, ce n’est pas normal. Elle n’a pas été embauchée pour passer du temps derrière son écran à vaquer à ses hobbies. »