Emmanuel Macron, à Mouchamps (Vendée), le 13 juin. / JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE

« Ah ! Jésus arrive ! » Dans le petit village de Mouilleron-Saint-Germain (Vendée), c’est un peu jour de fête nationale. Retenues derrière des barrières métalliques, quelques centaines de personnes patientent sous le soleil. Emmanuel Macron est attendu depuis une heure à la maison natale de Georges Clemenceau, où il doit inaugurer, ce mercredi 13 juin, un musée retraçant la vie du « Père la victoire », l’homme qui a sauvé la France en lui faisant gagner la première guerre mondiale, en 1918. Mais pas question pour le chef de l’Etat de bouder le bain de foule.

« Vous allez bien ? », « Ça me fait plaisir d’être là ! », « Vous êtes adorable…. » Encore plus que d’habitude, le président serre les mains, attrape les bras, enserre les épaules, souvent longuement. Chaque enfant a droit à un baiser sur la tête, les deux mains posées sur le crâne. « Accrochez-vous ! », lui lance un retraité. « Ne vous inquiétez pas », rassure Emmanuel Macron, derrière lequel la ministre de la culture, Françoise Nyssen, et la secrétaire d’Etat aux armées, Geneviève Darrieussecq, tentent de se frayer un passage.

La séquence tombe à point nommé pour le président de la République. Attaqué par certains proches sur le déséquilibre de sa politique sociale, critiqué par une partie de sa majorité pour son absence d’humanité dans l’affaire de l’Aquarius, Emmanuel Macron sait qu’il traverse une passe délicate. Quoi de mieux qu’une immersion de deux jours, en Vendée et en Charente-Maritime, où le président devait visiter, jeudi, la base aérienne 721 de Rochefort puis la maison de l’écrivain Pierre Loti pour mesurer sa popularité et faire taire ceux qui pensent l’énarque déconnecté du pays.

« Ces visites sont importantes, reconnaît Bruno Roger-Petit, le porte-parole de l’Elysée. Cela permet au chef de l’Etat de vérifier que le pays profond n’est pas crispé. » Malgré les difficultés, la cote de popularité d’Emmanuel Macron reste à un niveau élevé comparée à celle de ses prédécesseurs au bout d’un an de mandat. Selon le baromètre Elabe publié le 7 juin, 40 % des Français disent avoir toujours confiance dans l’action du président de la République. Surtout, fait-on remarquer avec satisfaction à l’Elysée, « le socle ne se fissure pas ». Toujours selon Elabe, « seulement » 19 % des électeurs du premier tour de M. Macron se disent déçus de son action.

« Rester ancré dans le réel »

A écouter son entourage, ces « immersions » sont aussi « un moment de détente » bienvenu au milieu des polémiques. « Il apprécie profondément d’être avec les gens. Ces interactions avec la vie de tous les jours, c’est ce qui permet au président de rester ancré dans le réel alors qu’il est en lévitation au palais » de l’Elysée, assure un proche. Emmanuel Macron a d’ailleurs demandé à ses équipes de lui organiser davantage de ces visites sur le terrain, malgré un agenda international très chargé.

Quelques heures plus tôt, le chef de l’Etat s’était également recueilli sur la tombe de Georges Clemenceau, à Mouchamps (Vendée), où il s’était rendu une première fois en août 2016, lorsqu’il était encore ministre de François Hollande. « Savoir se dresser et retrouver (…) la force, la fierté de la République et la force d’âme qui a toujours fait le peuple français, c’est en ça qu’il m’inspire », a déclaré M. Macron, avant de se recueillir devant le carré de terre entouré d’une simple grille de fer forgé où repose « le Tigre ». « L’esprit de défaite peut saisir tout un peuple », a aussi mis en garde le président en référence à l’année 1917, où la France était prête à lâcher face aux offensives allemandes, avant que Clemenceau ne prenne les rênes du pays.

Un moment solennel à l’opposé de la trivialité de la vidéo postée, la veille, par l’Elysée, où l’on voit Emmanuel Macron s’insurger contre « le pognon de dingue » dépensé dans les aides sociales, sans mettre pour autant un terme à la pauvreté. Durant la première journée de son périple, le président n’a pas été interpellé sur le sujet. Son entourage se montrait d’ailleurs très satisfait du « coup de com » dénoncé par Bruno Retailleau, sénateur LR de Vendée, qui avait accueilli le chef de l’Etat à Mouchamps. « Cette vidéo synthétise en très peu de temps la conception des politiques sociales d’Emmanuel Macron. La publier nous a semblé utile car beaucoup de gens s’informent aujourd’hui par les réseaux sociaux », assumait un conseiller. A son époque, Georges Clemenceau avait lui aussi voulu parler directement au plus grand nombre. C’était dans le journal L’Aurore, pour défendre Alfred Dreyfus.