« The Edge of Chaos », par Vasilija Abramovic, Ruairi Glynn et Bas Overvelde (Interactive Architecture Lab [UK], AMOLF [NL] et Studio Overvelde [NL]). / VINCIANE LEBRUN-VERGUETHEN

Une forêt de lianes cybernétiques, des nénuphars robotiques, une roseraie électronique… Voilà quelques-uns des éléments composant l’étrange « supernature » que nous invite à découvrir le Capitaine futur, personnage emblématique de la Gaîté-Lyrique. Après avoir exploré le monde des écrans, le globe-trotter transporte les visiteurs dans un nouvel univers. « Capitaine futur s’est dit que l’on venait peut-être de découvrir un nouveau monde qui se loge dans la profondeur de nos écrans. Il n’est pas revenu de sa traversée, il est toujours dans les profondeurs de notre époque », explique Jos Auzende, commissaire de l’exposition.

Doté d’une carte d’exploration de cette nature 2.0, le voyageur descend dans les sous-sols du bâtiment. Destinée à un jeune public mais ouverte à tous, l’exposition vise à « explorer une terre hybridée par le numérique », souligne la commissaire. Après être arrivés sur cette terra ingonita, les explorateurs sont immergés dans une ambiance sonore de bruits électroniques et robotiques. La lumière fait aussi son effet. Tamisée, elle donne à l’endroit une dimension de grotte dans laquelle on avance prudemment de peur de faire une mauvaise rencontre. Sur les murs apparaissent épisodiquement en animation les animaux qui peuplent ce nouvel écosystème. On peut ainsi croiser le farouche serpent USB, bestiole évolutive possédant un connecteur USB en guise de tête.

Le visiteur devient acteur

Constitué de 18 œuvres, dont 15 conçues spécialement pour l’exposition, le parcours est alimenté par le visiteur qui devient acteur. « La supernature pose la question de notre place d’humain dans un monde de machines », commente la commissaire. Si on parle trop fort, les fleurs de la roseraie électronique, conçue par l’artiste sud-africaine Miranda Moss, vont se refermer. De même, si le « voyageur » s’approche trop près de la Superlaitue, mise au point par le Français Thomas Suire, celle-ci prendra la poudre d’escampette. Montée sur son bocal motorisé, elle sillonne la salle d’exposition à la recherche d’un endroit calme où se reposer.

La présence humaine est en revanche indispensable pour donner vie à The Edge of Chaos, « clairière mathématique » des trois artistes Vasilija Abramovic, Ruairi Glynn et Bas Overvelde. L’énergie générée par les humains permet de créer une réaction en chaîne où des feuilles d’un nouveau genre se plient et se déplient comme un origami.

Avalanche permanente d’information

Au-delà du côté ludique, l’exposition ouvre une réflexion sur le monde d’aujourd’hui et de demain. « L’enjeu, c’est aussi de pouvoir questionner ce monde de technologie », insiste Jos Auznde. Notre rapport à l’information en continu est interrogé par exemple avec le Déferlement incessant, créé par le Français Vincent Houzé. Dans une pièce isolée, le visiteur se retrouve au centre d’une cascade qui le cerne. Une analogie avec l’avalanche permanente d’information qui nous parvient de toutes parts. L’installation rend compte du côté à la fois anxiogène et hypnotique de ce flux continu. Une pièce où l’on peut interagir pour détourner le flux, essayer de le remodeler sans jamais pouvoir l’arrêter.

On quitte le Capitaine futur non sans lui avoir laissé un petit mot sur le Tableau de bord, d’Eric Benqué, fresque collaborative où les visiteurs sont invités à livrer, en mots ou dessins, les impressions laissées par l’exposition.

« Capitaine futur et la supernature ». La Gaîté-Lyrique, 3 bis, rue Papin, Paris 3e. Jusqu’au 15 juillet, les mercredis, samedis et dimanches de midi à 19 heures (tous les jours sauf le lundi pendant les vacances). Tarifs : 7 €, gratuit pour les moins de 3 ans. www.gaite-lyrique.net