Ils se sont levés d’un bond lorsque le Sénégal a marqué le deuxième but, celui de la victoire, contre la Pologne. Dans le centre d’accueil aménagé à Cheste, à une trentaine de kilomètres de Valence, tout juste remis de leur périple de huit jours en mer, plusieurs dizaines de migrants, sauvés par l’« Aquarius », le navire de l’association SOS-Mediterranée, ont eu le plaisir de suivre ce match de la coupe du Monde de football, mardi 19 juin.

C’est ici, accompagnés d’une centaine d’intervenants de la Croix Rouge, que 444 des 630 passagers sauvés des eaux entre Malte et l’Italie et conduits en Espagne après le refus de ces deux pays de les accueillir, vont passer les prochains jours : 402 hommes et 42 femmes.

Douze mineurs non accompagnés, les plus jeunes, ont été logés dans un centre spécialisé à Castellon et 113 autres, âgés de 12 à 17 ans, dans une auberge de jeunesse à Alicante. Les familles sont hébergées à part. Sept personnes étaient toujours hospitalisées mardi matin.

« Blessures, déshydratation extrême, brûlures causées par le mélange de fuel et d’eau salée dans lequel certains ont failli se noyer, ou encore un cas de colique néphrétique ont été recensés, explique Arturo Valoria, membre de la Croix Rouge à Valence. La plupart ont dormi une bonne partie des journées de lundi et mardi. Ils sont épuisés par la traversée ».

Permis de résidence exceptionnel

A tous les migrants de l’« Aquarius », l’Espagne a donné un permis de résidence exceptionnel de 45 jours, pour raisons humanitaires. Durant cette période, leur situation sera examinée, cas par cas.

Ils appartiennent à une trentaine de nationalités différentes, dont beaucoup de Soudanais, de Nigérians et d’Érythréens. Ils ont aussi reçu la visite de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), afin d’organiser le voyage en France de ceux qui le souhaitent et répondent aux critères du droit d’asile.

« Près de la moitié des migrants a manifesté son désir de demander l’asile en France », a déclaré le gouvernement espagnol, lundi 18 juin. « Cela nous semble une situation assez appropriée. Il s’agit d’essayer de coopérer et de respecter les normes européennes et le droit international », a souligné la vice-présidente du gouvernement socialiste, Carmen Calvo.

« Des entretiens vont avoir lieu », a expliqué le directeur de l’Ofpra, Pascal Brice : « comme d’ordinaire, des vérifications de sécurité auront lieu par ailleurs. C’est sur la base de ces éléments que le gouvernement français décidera qui viendra sur le territoire pour y être protégé », a-t-il expliqué.

Le 16 juin, le gouvernement espagnol avait annoncé avoir accepté l’offre de la France de « coopérer dans l’accueil » des migrants de l’Aquarius qui « manifestent leur désir d’aller dans ce pays ». La proposition, formulée dans un document distribué aux migrants à leur arrivée sur le port de Valence, a connu un grand succès.

L’Espagne, où le chômage dépasse les 16 % de la population active et où les aides sociales sont limitées, n’est souvent qu’un lieu de passage pour les migrants qui font route vers l’Europe. En 2017, le royaume a enregistré 31 600 demandes d’asile, contre un peu plus de 100 700 pour la France.