L’épreuve de philosophie du bac, lundi 18 juin 2018 , à Versailles. REUTERS/Benoit Tessier / BENOIT TESSIER / REUTERS

Le professeur de philosophie Thomas Schauder a répondu aux questions d’internautes sur l’épreuve de philosophie du bac 2018, lors d’un tchat à l’issue de l’épreuve, lundi 18 juin. En voici le compte rendu :

Quel sujet était-il préférable de choisir ? Un sujet se démarque souvent par rapport aux autres, lequel était-ce cette année ?

Thomas Schauder : Cela dépend d’abord des séries. Ce qui m’a le plus marqué en découvrant les sujets, c’est, pour la série L, le texte de Schopenhauer (c’est un philosophe qu’on étudie souvent au chapitre du bonheur, et qu’on a plus rarement l’occasion d’aborder pour la question de l’inconscient). Et pour les S, c’est le second sujet « Eprouver l’injustice, est-ce nécessaire pour savoir ce qui est juste ? ».

A la question de ce qu’il fallait choisir, la seule règle, c’est de prendre le sujet avec lequel on se sent à l’aise, et mieux encore, celui dont on pense qu’on aura du plaisir à le traiter.

Que pensez vous de la présence très marquée de certains thèmes dans les sujets cette année (art, culture, vérité) ?

Ce sont des sujets classiques qui tombent très fréquemment, cela n’a donc rien de surprenant.

Le sujet sur la culture en L [« La culture nous rend-elle plus humain ? », sujet 1] pouvait-il s’analyser seulement de façon resserrée comme par exemple se concenter sur la culture dans le sens du travail de la terre ? Est-ce un hors-sujet ?

Limiter une des notions du sujet est une erreur. La culture, c’est effectivement l’agriculture, mais pas seulement. Il s’agit aussi des institutions, les normes et les valeurs, les connaissances, etc. La question, c’est donc bien de savoir si cet ensemble de choses nous rend plus humain. Ce n’est pas un hors-sujet, mais c’est trop resserré. Le candidat s’est donc limité tout seul.

Il faut en fait partir d’une interrogation : que veut dire « être humain » ? Une première hypothèse pourrait être de dire que nous sommes humains et que cette notion relève de la biologie, et donc pas de la culture mais de la nature. Mais ensuite, prendre conscience qu’« être humain », c’est une notion morale, « faire preuve d’humanité », par exemple.

A partir de là, on peut voir que la culture, c’est ce qui va nous distinguer, non seulement des autres espèces, mais c’est ce qui va aussi distinguer les groupes humains, les uns par rapport aux autres. Enfin, on peut espérer que grâce à l’art, à la connaissance, etc., nous devenions un peu meilleurs.

Le texte de Schopenhauer [ « Le Monde comme volonté et comme représentation » , sujet 3 en série L] était vraiment bizarre. Comment fallait-il le traiter ?

Ce n’est pas si bizarre : cela rejoint deux notions, celle de l’inconscient et celle du déterminisme.

Schopenhauer explique que nous n’avons pas pleinement conscience de pourquoi nous faisons ce que nous faisons. Il réfléchit aux motifs de nos actions.

Le texte se divisant en deux paragraphes, on aurait pu garder cette structure-là. Dans le premier, il parle d’un constat, dans le second, il en explique les raisons. La fin de cet extrait est une ouverture vers la question de l’autoaveuglement, sur laquelle le candidat aurait pu construire une conclusion (est-ce que nous nous mentons à nous-mêmes ?, pourquoi, etc.).

Bac philo L 2018, corrigé du sujet 3 : commentaire de texte de Schopenhauer
Durée : 10:37

Pour asseoir sa réflexion, est-il bienvenu, obligatoire, ou pas du tout, de donner des exemples ? Je pense au sujet sur l’art du bac ES [« Peut-on être insensible à l’art ? »].

Oui, il est obligatoire de donner des exemples. Non seulement, ils nourrissent la réflexion, mais en plus, cela prouve au correcteur que l’on réfléchit par soi-même et qu’on ne se contente pas de réciter quelque chose. C’est vrai pour ce sujet, mais pour tous les autres aussi.

Néanmoins, les exemples ne remplacent pas les arguments, une dissertation n’est pas seulement un catalogue d’exemples. Chaque argument peut être accompagné d’exemples et on peut même se resservir du même exemple avec différents arguments, pour montrer que l’on peut l’examiner sous différents aspects. Cela aide à faire avancer la réflexion.

Je suis en ES et jai pris l’explication de texte qui a pour thème la religion [Sujet 3 :
« Les Formes élémentaires de la vie religieuse, Emile Durkheim » ]. J’ai utilisé mon cours sur l’Etat car je le connaissais mieux et qu’il se prêtait plutôt bien au texte. Est-ce qu’il est possible que j’ai fait un hors-sujet ?

C’est un texte un peu difficile. Il n’est ni directement sur la religion ni sur l’Etat. La question que pose ce texte est « pourquoi est-ce que l’on obéit, individuellement et collectivement ? » Si vous avez bien vu que c’était ça le cœur du texte, et si vous vous êtes servi d’éléments de votre cours, cela ne devrait pas être hors sujet.

Bac philo ES 2018, corrigé du sujet 3 : commentaire de texte de Durkheim
Durée : 14:49

Pour le sujet 1 en S [« Le désir est-il marque de notre imperfection ? »], si j’ai fait une partie sur « les désirs, des défauts » et une deuxième sur la perfectibilité de l’homme, est-ce que ça marche (sachant que j’ai lié les deux )?

Si les deux sont liés, cela peut en effet être intéressant, tant que les deux n’ont pas été déliés, pourquoi pas.

J’aurais proposé d’abord de s’interroger sur la raison du lien entre désir et imperfection, ce qui aurait mener à la notion de manque : c’est parce qu’on désire que l’on va essayer de se parfaire, de s’améliorer.

Je suis en terminale S et le sujet portant sur : Le désir est-il LA marque de notre imperfection, je me suis permis de consacrer une partie sur d’autres marques possibles de l’imperfection de l’homme : ai-je été en tort ?

Si vous en avez parlé en passant, ce n’est pas hors sujet, mais il ne fallait pas consacrer toute une partie et surtout ne pas laisser de côté la notion de désir.

Bac philo S 2018, corrigé du sujet 1 : « Le désir est-il la marque de notre imperfection ? »
Durée : 07:47

Quel plan était le plus judicieux pour le texte de Mill [John Stuart Mill, « Système logique », sujet 3 en S] ?

Je diviserais le texte en deux parties, d’abord l’affirmation que les « phénomènes de la société » obéissent à des lois, comme les phénomènes naturels, et ensuite, il y a quand même une différence entre les deux : le nombre de paramètres n’est pas le même et cela rend les phénomènes sociaux plus difficiles à prévoir.

Bac philo S 2018, corrigé du sujet 3 : explication de texte de John-Stuart Mill
Durée : 09:48

En bac STI2D, la question était « L’existence peut-elle être trompeuse » [sujet 1], j’ai répondu « Oui bien entendu ». Est-ce juste ?

Tout dépend de votre façon de justifier cette affirmation. Par ailleurs, dans tous les cas, ce n’est pas tant la réponse à la question qui compte, que l’interrogation que l’on dégage à partir de la question.

Je suis en STMG et j’ai pris le commentaire de texte [Sujet 3, séries technologiques sauf STHR : Montesquieu, extrait de « De l’esprit des lois »]. Il y avait donc trois questions. Comment fallait-il s’y prendre sachant que je n’ai jamais bossé ça avec mon prof ?

Les trois questions du sujet du bac technologique sont là pour « guider votre rédaction ». Ce n’est pas grave de ne pas les traiter comme des questions. Mais si on préfère, on peut aussi simplement y répondre.

Je viens de sortir de l’épreuve et ayant pris l’explication de texte (par manque de connaissance d’œuvres et de citations, je l’admets), je me demande si je n’ai pas assez parlé des pensées d’autres auteurs, je n’en ai mis que deux. Est-ce pénalisant ?

C’est déjà plus que les trois quarts des élèves, qui ne parlent que de l’auteur du texte.

En voyant tous mes camarades partir au bout d’une heure, j’ai décidé de vite finir et de les rejoindre, me disant que s’ils avaient fini, c’est que le sujet était vraiment facile. Est-ce une bonne stratégie ?

Cela ne veut pas forcément dire que le sujet était facile, mais plutôt que vos camarades étaient impatients. Pour les prochaines épreuves, je vous conseille de travailler à votre rythme et de ne pas faire attention à ce que font vos camarades.

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