La présidente de l’Autorité de la concurrence, Isabelle de Silva, en juillet 2017, à Paris. / ERIC PIERMONT / AFP

Comment mieux encadrer les concentrations à l’heure de la révolution numérique ? L’Autorité de la concurrence, qui a publié, lundi 25 juin, son rapport d’activité pour l’année 2017, a annoncé s’être emparée du sujet. « Nous creusons une nouvelle piste, qui serait d’introduire le contrôle ex post des concentrations, c’est-à-dire une intervention très ciblée, chirurgicale », a déclaré sa présidente, Isabelle de Silva. Autrement dit, l’Autorité s’arrogerait le droit d’étudier une opération de fusion a posteriori, en fonction de « l’enjeu concurrentiel » qu’elle représente.

Aujourd’hui, c’est le chiffre d’affaires qui déclenche les enquêtes de l’autorité de régulation. Problème, ce critère a du mal à embrasser les nouveaux cas de figure de l’économie numérique, où des start-up ayant un très fort impact sur le public mais générant peu de revenus sont reprises à prix d’or par des géants du numérique.

En 2014, le rachat de WhatsApp par Facebook pour 22 milliards de dollars (19 milliards d’euros), avait mis en émoi le monde du numérique. De fait, le réseau social de Mark Zuckerberg, qui comptait 1,4 milliard d’utilisateurs par mois fin 2014, mettait la main sur une application de messagerie utilisée par 450 millions de personnes par mois.

Lancement d’une consultation

Pourtant, la Commission européenne et la Federal Trade Commission (FTC), le gendarme de la concurrence américaine, avaient donné leur blanc-seing à l’opération. Preuve que, quatre ans plus tard, ce mouvement de concentration dans les données laisse encore un goût amer, un groupe d’associations anti-Facebook a demandé, début juin, à la FTC de scinder Facebook, qui possède aussi le réseau social Instagram, en plusieurs morceaux.

Reste pour l’Autorité de la concurrence française à savoir comment procéder. Le régulateur a d’abord songé à changer la loi pour introduire un critère fondé sur le montant des transactions, « comme l’ont fait les Allemands et les Autrichiens », a précisé Isabelle de Silva. En Allemagne, toute opération supérieure à 400 millions d’euros est notifiée au gendarme de la concurrence du pays. Mais les « sages » de la rue de l’Echelle, à Paris, ont rejeté cette option, qui agirait comme « un filet qui ramasse beaucoup de poissons ». Tous les poissons ne nous intéressent pas forcément », a déclaré la présidente, qui préfère une option offrant plus de souplesse. L’Autorité a lancé une consultation auprès des entreprises et d’autres régulateurs de la concurrence. Elle rendra un avis à l’automne.