Agence immobilière, à Paris, 19 décembre 2017. / LIONEL BONAVENTURE / AFP

Les agents immobiliers peuvent se frotter les mains. Marché dynamique, prix en hausse… les six premiers mois de 2018 s’avèrent fructueux. « L’activité est stabilisée mais à plein régime, et la hausse des prix est contenue à 2,3 %, explique Laurent Vimont, le président de Century21, dont les 852 agences ont conclu en un an, au 30 juin, plus de 45 000 ventes. Nous ne dépasserons pas, en 2018, le record de 960 000 transactions atteint en 2017 mais nous en serons très proches. » La Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim) anticipe 950 000 ventes, « la seule difficulté étant de trouver des biens à vendre. » Car, en cinq ans, le volume des ventes a progressé de 41 %, mais celui du parc, de 5 % seulement. La rotation des biens s’accélère donc, avec 2,6 % de l’ensemble des logements mis en vente cette année contre 2 % en 2013, soit une hausse de 30 %.

Dans la plupart des régions, les logements gagnent en valeur « sans cependant dépasser les sommets atteints au premier semestre 2011 », remarque M. Vimont. La Bourgogne-Franche-Comté, avec Dijon qui reprend des couleurs, progresse de 5,8 % ; Auvergne-Rhône Alpes et sa capitale Lyon, de 3,1 %. Le Centre Val-de-Loire et les Hauts-de-France contrastent, avec un recul des prix de, respectivement, 3,6 % et 5 %, tandis que la Normandie stagne.

A Bordeaux, où les prix avaient flambé de 12 % selon les notaires en 2017, la hausse reste soutenue (5,8 %). « Les vendeurs trop gourmands ne vendent plus en centre-ville, avertit Dayan Lomont, de l’agence Century21 du Bouscat, en Gironde, et nous enregistrons 16 % de compromis en moins. Le Parisien qui débarque et est prêt à payer n’importe quel prix, c’est un mythe. »

A Bordeaux, 20 % des acquéreurs viennent de l’extérieur de la métropole, 12 % de Paris, attirés par le dynamisme économique de la ville et l’arrivée d’entreprises comme Betclic, site de paris sportifs en ligne qui a déménagé, en avril, son siège parisien et son bureau londonien dans le nouveau quartier des Bassins à flot, et de Dassault aviation, à Mérignac. La hausse, achevée en centre-ville, se propage en périphérie, irriguée ou en voie de l’être par le tramway : la ligne D desservira fin 2019 le Bouscat, Bruges et Eysines, puis, d’ici à 2022, Saint-Médard-en-Jalles, dernière station avant la plage.

En ville, la municipalité contrôle de près les locations touristiques de courte durée qui avaient « colonisé » de façon préoccupante les quartiers Saint-Pierre et Saint-Michel, chassant les habitants. Pour ne plus subir ce phénomène, Century21 a conclu, le 26 juin, un partenariat avec Airbnb pour inciter les locataires de longue durée à ne sous-louer qu’en accord avec leur bailleur et dans la limite légale de cent vingt jours par an. Les bailleurs, engagés par un bail spécifique, se retrouvent ainsi intéressés à l’affaire à hauteur de 23 % des revenus tandis que les locataires améliorent leur solvabilité en toute transparence.

Paris toujours cher

A 200 kilomètres au sud, Toulouse affiche encore des prix raisonnables, entre 3 000 et 3 500 euros le mètre carré dans l’ancien, 4 000 euros dans le neuf. « La hausse de 10 % subie en 2017 décourage tout de même les acquéreurs, plus hésitants et attentistes », note l’agent immobilier Gilles Caminade. La ville s’impatiente d’accueillir la ligne à grande vitesse, et le maire (LR) Jean-Luc Moudenc veut son quartier futuriste, derrière la gare Matabiau. Le projet ? La construction sur l’ancien site du tri postal, par la Compagnie de Phalsbourg, de la tour Occitanie, haute de 150 mètres, à l’architecture audacieuse confiée à Daniel Libeskind et au cabinet local Kardham-Cardete Huet. Celle-ci comportera bureaux, hôtels, restaurants, logements sociaux mais aussi appartements de luxe qui pourraient, eux, être commercialisés, d’ici à 2022, autour de 7 000 euros le mètre carré, ce qui surprend ici.

Paris reste champion de France des prix chers et des hausses insoutenables. Intra muros, le prix moyen du mètre carré atteint, à fin juin, 9 360 euros, selon les avant-contrats des notaires, en hausse de 5,2 % en un an, contre 7,3 % à fin 2017. L’arrivée de centaines de cadres de banques chassés de Londres par le Brexit, déboulant à Paris avec des budgets sans limite, poussera encore les prix dans les quartiers chics : « Les biens à plus de 1,5 million d’euros, ce n’est que 5 % du marché, tempère M. Vimont, mais les ouvriers et les employés, voire les commerçants et les artisans se trouvent exclus de l’accession à la propriété dans Paris au profit des cadres supérieurs et professions libérales qui représentent 46 % des acheteurs. »

Enfin, le marché de la résidence secondaire s’enfonce dans la crise, avec bien plus de vendeurs que d’acheteurs. Il compte, aujourd’hui, pour 6 % de l’ensemble des ventes, contre 8 % il y a pas même un an : « Pour un propriétaire de résidence secondaire, deux jours sont fantastiques : celui où il achète et celui où il vend », ironise M. Vimont.