On ne verra plus LeBron James sous le maillot des Cavs. / MADDIE MEYER / AFP

En 2014, c’est par une lettre, publiée dans le magazine Sport Illustrated qu’il avait annoncé « revenir à la maison », à Cleveland. Avec les Cleveland Cavaliers, lui le gamin de la ville voisine d’Akron, LeBron James a disputé quatre finales NBA d’affilée. Et apporté, en 2016, le premier titre jamais décroché par la franchise de l’Ohio. Sèchement battu début juin par les Golden State Warriors en finale (victoire en coup de balai, 4-0, des coéquipiers de Stephen Curry), le « King » semblait décidé à changer d’air. Et au premier jour de la « free agency » (la période des transferts), les agents du joueur ont annoncé sa signature dans la franchise historique des Los Angeles Lakers.

« LeBron James, quatre fois MVP [« most valuable player », meilleur joueur] de la NBA, trois fois MVP des Finals, et deux fois champion olympique, a accepté un contrat de 154 millions de dollars sur quatre ans avec les Los Angeles Lakers », avise Klutch Sports Group dans un communiqué. Une annonce toute en sobriété loin du show télévisé « The Decision » – dont s’est récemment inspiré Antoine Griezmann – qui avait défrayé la chronique en 2010 et vu des fans de Cleveland brûler le maillot de leur idole par dépit devant son départ à Miami.

Assagi et désormais trentenaire, le joueur, libre de tout contrat depuis quelques jours, avait annoncé vouloir prendre sa décision seul, en compagnie de sa famille et de ses agents.

A 33 ans, celui qui est considéré comme le meilleur joueur de la planète rejoint le troisième club de sa carrière. Après Cleveland, par deux fois (de 2003 à 2010 et de 2014 à 2018) et Miami (entre 2010 et 2014), l’« Elu » (c’est son surnom) entame un nouveau parcours. Loin de la terre brûlée à laquelle commençait à ressembler la franchise de l’Ohio, qu’il avait hissé une nouvelle fois en finale NBA cette saison en dépit du départ de son lieutenant Kyrie Irving l’été dernier, d’un effectif instable et vieillissant, et de conflits récurrents avec Dan Gilbert, le propriétaire des Cavs.

Dans les pas de glorieux aînés

Pour la première fois de sa carrière, le quadruple MVP quitte la Conférence Est pour rejoindre l’Ouest, et la Californie. C’est désormais sur les terres du double champion en titre, les Warriors, qu’il a affronté lors des quatre dernières finales NBA (pour un seul sacre), que l’ailier poursuivra sa carrière.

Pour la mythique franchise angeleno, qui arbore au plafond de son Staples Center seize bannières de champion NBA, cette signature est un coup d’éclat. Notamment pour son président des opérations basket, Earvin « Magic » Johnson. Superstar des « pourpres et or » dans les années 1980 et début des années 1990, l’ancien meneur de la Dream Team aux Jeux olympiques de 1992 a d’ores et déjà réussi son pari. Lors de sa nomination, en février 2017, « Magic » avait promis aux fans de la franchise de ramener une star, afin de « travailler sans relâche pour ramener les Lakers vers le titre de champion ».

Depuis la retraite de Kobe Bryant – cinq titres avec les Lakers – en 2016, la franchise de Los Angeles avait entamé une patiente reconstruction. Dans les tréfonds du championnat, l’équipe misait sur sa jeune garde – symbolisée par l’ailier Brandon Ingram et le meneur Lonzo Ball –, son entraîneur Luke Walton (assistant chez les Warriors lors de leur saison record de 73 victoires en 82 rencontres) et son attractivité historique pour attirer des gros poissons sur le marché des joueurs.

La signature de LeBron James vient valider cette stratégie, et elle pourrait entraîner un effet domino dans toute la NBA. En conflit avec son club de San Antonio, l’ancien MVP des finales 2014 (face au Miami Heat de LeBron James) Kawhi Leonard ne cache pas ses envies de rejoindre les Lakers. Un retour aux sources pour le natif de Riverside, dans la banlieue de Los Angeles, qui pourrait intervenir par le truchement d’un transfert.

A Los Angeles, LeBron James inscrira ses pas dans ceux de glorieux aînés. Outre Magic Johnson, « âme » du club et inspirateur de l’esprit « showtime » qui a déferlé sur la NBA dans les années 1980, les légendes Wilt Chamberlain, Kareem Abdul-Jabbar – meilleur marqueur de l’histoire de la ligue –, Shaquille O’Neal et Kobe Bryant ont revêtu le maillot pourpre et or frappé du mot « Lakers ».

Accumulant années après années les records personnels, le joueur aspire à décrocher un nouveau titre. Car en dépit d’une série – en cours – de huit finales NBA d’affilée (et neuf en tout), « King James » n’a décroché que trois couronnes dans sa carrière (en 2012 et 2013 avec le Heat et en 2016 avec les Cavaliers). La faute notamment à l’émergence à l’Ouest des Golden State Warriors, une équipe aux allures de dynastie menée par Stephen Curry et Kevin Durant.

Adieux en noir et blanc à Cleveland

Si l’on ne sait pas encore quels autres joueurs suivront la trace de James dans la cité des Anges, l’effectif angeleno devra à coup sûr être renforcé au cours de l’été pour espérer rivaliser avec l’invincible armada de la baie de San Francisco. Mais l’histoire va dans le sens du gamin d’Akron. En 2010, lors de sa signature à Miami, LeBron James avait formé avec Dwayne James et Chris Bosh un triumvirat d’amis réunis pour décrocher des bagues (de champion NBA). Et à son retour dans l’Ohio quatre ans plus tard, lui et Irving avaient été rejoints par la star des Minnesota Timberwolves Kevin Love.

Deux ans après avoir tenu sa promesse de briser la malédiction de « Miserable city » – le surnom de Cleveland – en apportant à la ville son premier titre majeur en sport depuis 52 ans, LeBron James quitte son cocon de l’Ohio. Fortement investi dans l’aide aux communautés locales et de plus en plus engagé dans la défense des noirs américains – il a notamment pris à partie le président Donald Trump entré en guerre contre les footballeurs américains s’agenouillant pendant l’hymne américain –, il laissera une trace indélébile dans la ville de l’Ohio.

Ses adieux à l’Ohio, où il avait annoncé en 2014 vouloir achever sa carrière, LeBron James les a fait à travers une sobre « story » Instagram en noir et blanc le représentant au cœur de la foule clevelandaise, au lendemain de la tant attendue victoire des Cavaliers en finale NBA. « Merci le nord-est de l’Ohio pour ces quatre incroyables saisons. J’y serai toujours à la maison », écrit James. Avant de conclure : « à bientôt ». Qui sait, un jour peut-être, au terme de son aventure angeleno, le « kid d’Akron » rentrera à nouveau au bercail.