Documentaire sur Arte à 21 h 50

Exit la viande, le poisson, le lait, l’œuf ou encore le miel. Le menu des végans a pour règle d’exclure toute nourriture d’origine animale, pour des raisons de santé, d’environnement ou de bien-être animal.

Mais le véganisme propose-t-il un mode de vie réellement plus sain, plus éthique, plus écologique, comme le prétendent ses adeptes ? C’est la question que s’est posée le réalisateur John Kantara, en s’aventurant dans les coulisses du mouvement végan.

Si, en Allemagne, le véganisme est de plus en plus entré dans les mœurs, il reste timide en France, malgré l’ouverture de restaurants spécialisés. Dans son enseigne parisienne, Deborah Pivan propose des plats exclusivement à base de substituts végétaux. Cette Américaine entend ainsi montrer que la gastronomie à la française peut être compatible avec le véganisme. Seul le fromage reste un produit encore difficile à pasticher.

Du lait de...lupin

Mais l’alimentation végane n’est pas l’apanage des citadins branchés ; elle représente également un enjeu économique pour les producteurs et les industriels. John Kantara prend ainsi l’exemple du lupin bleu. Cette plante riche en protéines, utilisée comme engrais pour lutter contre l’appauvrissement des sols, donne, une fois transformée, également du lait.

Ainsi dans le nord-est de l’Allemagne, nombre d’agriculteurs se sont tournés vers la culture du ­lupin, qui s’avère plutôt rentable. En effet, 30 tonnes de graines permettent de produire plus de 150 000 litres de lait.

Plus étonnant encore, en Basse-Saxe, l’une des plus vieilles entreprises de la filière viande et ­charcuterie du pays, la Rügenwalder Mühle, s’est mise à élaborer des saucisses végétales. Afin de viser le public végan, mais aussi celui des flexitariens, qui s’autorisent de temps à autre des écarts carnivores. Aujourd’hui, ces produits représentent 20 % du chiffre d’affaires de la société.

Mais certaines associations de consommateurs remettent en cause l’irréprochabilité de ces produits végans industriels et leurs méthodes de fabrication, semblables à celles que fustigent précisément les végans.

Ces produits alternatifs contiennent souvent quantité de produits chimiques, dont certains ­seraient nocifs pour la santé. Ce qui ne manque pas d’ironie quand on sait que l’alimentation végane est censée être plus saine que les denrées traditionnelles.

Exemple de plat végan. / SWR/CELLULOID FABRIK

Le documentaire relève aussi les problèmes politiques que recouvre la mouvance végane. Au sein de l’Union européenne, les laits alternatifs n’ont pas droit à la dénomination « lait » – excepté notamment celui de coco. Et les lobbyistes du secteur laitier veillent à ce que ces normes perdurent, ­notamment pour protéger les agriculteurs affectés par la crise du prix du lait.

Loin de ces restrictions étatiques, de l’autre côté de l’Atlantique, le marché du végan génère des milliards de dollars et les scientifiques s’emparent du phénomène. Dans les laboratoires de la Silicon Valley, des chercheurs élaborent de la viande de synthèse, grâce aux biotechnologies. Une nourriture 3.0 qui pourrait, selon eux, ­représenter une réelle alternative aux actuels composants d’origine animale. Au gré de ses dégustations, John Antara met au jour les particularités de la mouvance ­végane. Ses qualités, mais aussi les défauts qu’il lui reste encore à gommer. Vivre végan adopte toutefois un ton résolument optimiste. On regrettera cependant que cette enquête n’englobe pas dans son ensemble la philosophie végane, qui concerne aussi les objets, les vêtements ou encore les produits de beauté.

Vivre végan, le nouvel éden ?, de John Kantara (Allemagne, 2016, 43 min).