Le Mozambique est devenu une plaque tournante du trafic de l’héroïne vers l’Europe, au point que cette drogue est « probablement » devenue son deuxième produit d’exportation, affirme une étude.

« Le trafic a augmenté jusqu’à 40 tonnes ou plus [au Mozambique], ce qui en fait une source d’exportation majeure qui contribue jusqu’à hauteur de 100 millions de dollars par an [85 millions d’euros] à l’économie locale », écrit le journaliste et analyste Joseph Hanlon, grand connaisseur du Mozambique et auteur de l’enquête avec le projet européen Enact. « Avec une valeur de 20 millions de dollars par tonne, l’héroïne est probablement sa première ou sa deuxième source d’exportation après le charbon », poursuit le membre de la London school of economics.

Chaque année, quelque 800 millions de dollars de drogue en provenance d’Afghanistan et du Pakistan transitent, par la mer ou la route, vers les pays africains et l’Europe, selon l’étude.

Corruption des autorités locales

Le rôle du Mozambique, qui dispose de plus de 2 400 km de côtes sur l’océan Indien, inquiète depuis des années les chancelleries occidentales. Dès 2009, des télégrammes diplomatiques américains révélés par WikiLeaks avaient fait du pays la « deuxième place africaine la plus active pour le transit des narcotiques » après la Guinée-Bissau. « Pas tout à fait un narco-Etat corrompu, mais la tendance est inquiétante », avait estimé l’un d’eux.

Selon John Hanlon, la situation ne s’est pas améliorée. « Depuis vingt-cinq ans, le trafic est contrôlé par quelques familles de commerçants locaux et étroitement régulé par le Frelimo, le parti au pouvoir », écrit le chercheur. La corruption des autorités locales et leur manque de moyens empêchent de lutter efficacement contre le trafic. « Certaines compagnies [maritimes] ne sont pas contrôlées et la corruption règle tous les problèmes », note M. Hanlon, ajoutant que « le Mozambique ne dispose pas de garde-côtes ».

Sollicité par l’AFP, le porte-parole de la police nationale mozambicaine a répondu que l’étude et ses conclusions faisaient l’objet d’une « analyse approfondie » de la part des autorités. « Un énorme travail [contre le trafic] a été accompli par la police dans les aéroports, mais la géographie de notre pays nous rend beaucoup plus vulnérables à nos frontières terrestres et maritimes », a concédé Inacio Dina.

Le Mozambique traverse depuis deux ans une grave crise financière pour avoir caché une partie de sa dette à ses bailleurs de fonds. Il est assis sur d’énormes réserves de gaz dont il espère tirer d’importants revenus à partir de 2023.