L’élection présidentielle camerounaise aura lieu le 7 octobre, selon un décret présidentiel publié lundi 9 juillet. Paul Biya, 85 ans dont bientôt trente-six au pouvoir, n’a pas annoncé s’il serait candidat à une sixième réélection, mais il est présenté par son parti comme son candidat « naturel ». Pour de nombreux observateurs camerounais, le chef de l’Etat entretient « un faux suspense ».

« Paul Biya est notre candidat à la prochaine présidentielle, au regard de son bilan éloquent, de sa crédibilité nationale et internationale, diplomatique, économique, sociale et culturelle », avaient ainsi écrit en mai des responsables du parti au pouvoir et des chefs traditionnels originaires du Sud, où est né le chef de l’Etat.

Le même mois, l’ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun, Peter Henry Barlerin, avait déclaré, à l’issue d’un entretien avec le président, que Paul Biya « devrait réfléchir à son héritage et à comment il veut que l’on se souvienne de lui dans les livres d’histoire », suscitant de vives critiques dans le camp présidentiel.

« Bilan chaotique »

Les opposants qualifient le bilan de l’actuel chef de l’Etat de « chaotique ». Parmi eux, Joshua Osih, qui a été investi en février candidat du principal parti d’opposition, le Social Democratic Front (SDF, anglophone).

Cet homme d’affaires de 49 ans tentera de briguer un septennat à ce scrutin au suffrage universel à un tour, comme l’avait fait lors de la plupart des scrutins précédents Ni John Fru Ndi, leader du SDF et opposant historique à Biya, qui aurait cette fois décidé de céder la place aux « jeunes cadets » du parti.

Parmi les autres candidats de poids de l’opposition, selon les analystes, figurent l’avocat et ancien vice-président de Transparency International, Akere Muna, ainsi que le président du parti Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), Maurice Kamto. En l’absence de sondages d’opinion, il est toutefois difficile d’estimer le poids réel de chacune de ces personnalités politiques.

Vives tensions

Le décret présidentiel a été lu à la télévision publique à un moment où les tensions restent vives en zone anglophone, en particulier dans la ville de Buéa. Les habitants de la capitale de la région du Sud-Ouest étaient encore cloîtrés chez eux par peur de sortir après de nombreux échanges de tirs dans la matinée entre des soldats et des hommes armés non identifiés. Ces derniers, présentés à l’AFP par des habitants comme des séparatistes, ont fait irruption dans la ville lundi matin.

C’est la première fois que des échanges de tirs ont lieu dans des quartiers de cette ville de plus de 100 000 habitants, quadrillée par un grand nombre de militaires depuis le début de la crise anglophone, fin 2016. Dimanche, un commissaire de police a été tué à Kumba, dans le Sud-Ouest.

Cette crise géopolitique s’est muée en conflit armé fin 2017. Aujourd’hui, les combats sont devenus quasi quotidiens entre les forces de sécurité camerounaises et des hommes armés se réclamant de « forces de restauration » d’un Etat anglophone qui avait brièvement vu le jour entre les deux guerres mondiales, sous mandat britannique.