Emmanuel Macron devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles, lundi 9 juillet. / JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE

Editorial du « Monde ». A première vue, rien ne change. Devant le Parlement réuni en Congrès, lundi 9 juillet, à Versailles, Emmanuel Macron, « humble mais résolu », a justifié sa politique visant d’abord à « renforcer notre économie ». « Il n’y a pas d’un côté une action économique et de l’autre une action sociale, a-t-il affirmé, c’est le même trait, la même finalité : être plus forts pour pouvoir être plus justes ».

« Conscient du décalage entre l’ampleur des réformes engagées et le résultat ressenti », le président de la République a aussi assuré n’avoir rien oublié des « peurs » et des « colères » de la société française. Confronté à une chute sensible de sa cote de popularité et à la montée des doutes au sein de sa majorité, il n’est pas resté sourd aux inquiétudes de l’opinion.

M. Macron, qui s’est rangé dans le camp des « progressistes » face aux « nationalistes » en Europe, a voulu amorcer un rééquilibrage social, avec plusieurs inflexions qui n’ont rien d’anecdotique. Il a fait entendre une petite musique dont les premières notes avaient rythmé sa campagne électorale avant de s’effacer dès le début de son quinquennat.

« République contractuelle »

Insistant sur sa volonté de « s’attaquer aux racines profondes des inégalités de destin, celles qui sont décidées avant même notre naissance, qui favorisent insidieusement les uns et défavorisent inexorablement les autres », il a prôné une « politique de l’émancipation », un concept cher à la gauche et aux syndicats. Mais, en même temps, il a vanté des valeurs chères à la droite, en mettant en avant les devoirs et la responsabilité individuelle, « les talents, l’effort, le mérite », à travers le travail.

Après avoir tenu pour quantité négligeable les acteurs sociaux et les corps intermédiaires, M. Macron leur a ouvert la porte. S’il n’est pas, comme François Hollande, un adepte de la démocratie sociale, il a repris l’idée, évoquée dans sa campagne, d’une « République contractuelle ». Lors de son premier sommet social avec les organisations syndicales et patronales, le 17 juillet, il veut « jeter les bases d’un nouveau contrat social, celui du siècle qui s’ouvre ». Il reprend ainsi une formule chère à Michel Rocard qui avait tenté, lorsqu’il était premier ministre, de « bâtir une société contractuelle », au diapason de la CFDT.

Un agenda social sera élaboré avec comme premier objectif une révision des règles de l’assurance-chômage afin de lutter contre le développement de « la permittence et la précarité ». Il va aussi recevoir les 100 premières entreprises françaises pour leur demander de prendre des engagements de créations d’emplois et d’embauches d’apprentis.

« Sortir de la pauvreté »

L’autre inflexion, déjà esquissée lors de son discours devant la Mutualité française le 13 juin, est sa volonté de « construire l’Etat-providence du XXe siècle »,« un Etat-providence émancipateur, universel, efficace, responsabilisant, c’est-à-dire couvrant davantage, protégeant mieux, s’appuyant aussi sur les mêmes droits et les mêmes devoirs pour tous ».

Les réformes des retraites et de la dépendance devraient être les piliers, en 2019, de cette refondation. Auparavant, la stratégie de lutte contre la pauvreté, qui doit être dévoilée en septembre, sera un premier test. Pour M. Macron, elle ne doit pas permettre « à nos concitoyens pauvres de vivre mieux, mais bien de sortir de la pauvreté ». Un an II du quinquennat plus social ? Les intentions sont louables, encore faut-il passer aux actes.