Documentaire sur Arte à 22 h 25

« La vitesse et les machines, c’est ce qu’il avait dans le caleçon – désolée… Je ne peux le dire autrement… », lâche à propos de Steve McQueen la première de ses trois épouses, la danseuse et chanteuse Neile Adams. Et « ses yeux couleur piscine : un électrochoc », ajoute la deuxième, la comédienne Ali MacGraw.

« Je ne sais pas si je suis un coureur qui joue dans des films ou un acteur qui fait des courses », dira pour sa part McQueen, qui vivait à 100 – ou plutôt 160 – à l’heure et tournera, quasiment sans doublure, l’une des plus stupéfiantes courses-poursuites automobiles de l’histoire du cinéma dans Bullitt (1968), de Peter Yates.

La vitesse – vite, très vite – et la séduction – mâle, très mâle – sont les deux axes que parcourt le documentaire I Am Steve McQueen, de Jeff Renfroe, du premier film de McQueen, Danger planétaire (1958), d’Irvin S. Yeaworth Jr. et Russell S. Doughten Jr., à La Tour infernale (1974), de John Guillermin et Irwin Allen, son dernier grand succès, qui l’oppose à Paul Newman, l’autre paire d’yeux bleus du cinéma américain.

Car ils s’opposent, en effet : Steve McQueen, qui est jaloux de son collègue – ainsi que le rappelle Ali MacGraw –, impose d’avoir exactement le même nombre de répliques que Newman. Et l’agressivité l’un pour l’autre dont leurs rôles témoignent semble taillée sur mesure pour coller au réel.

Mirobolant cachet

McQueen, dont le contrat prévoit qu’il reçoive un pourcentage des recettes, touche alors l’équivalent de quelque 70 millions de dollars (60 millions d’euros) actuels – en plus de son mirobolant cachet, le plus haut de l’époque.

Mais Steve McQueen, qui est un homme tourmenté et inquiet, s’éloigne des écrans : « Etre un acteur c’est le pied ; être une star de cinéma c’est casse-pieds », dira-t-il. On lui propose le premier rôle de films au devenir fameux (Vol au-dessus d’un nid de coucous, Rencontres du troisième type, Rambo, Apocalypse Now) : il les refuse tous.

Celui qui a pour égale passion la course en automobile ou à moto rencontre Barbara Minty, une jeune mannequin. Il est barbu, hirsute, à peine reconnaissable ; elle lui trouve « une allure de clochard », mais les yeux couleur piscine feront leurs ravages habituels.

La jeune femme partage son goût pour la course et adore les pick-up, les caravanes… Ce seront deux années de bourlingue interrompues tragiquement en 1980 : on diagnostique chez l’acteur un cancer des poumons contracté probablement dans ses jeunes années dans la marine, alors qu’il nettoyait les coques de bateaux bourrées d’amiante.

Steve McQueen, en avril 1970, sur le tournage du film « Le Mans ». / AFP PHOTO

Il aura le temps de tourner et de produire un étrange western, Tom Horn (1980), et de faire un dernier film avant de succomber aux métastases qui ont envahi son abdomen. Steve McQueen n’avait que 50 ans.

De nombreux témoignages, d’amis, d’admirateurs – cinéastes, acteurs, cascadeurs –, de ses ex-épouses, de son fils et de ses petits-enfants, apportent un commentaire intéressant à ce film agrémenté de films familiaux privés.

On y apprend que McQueen aimait la fumette, mais aurait également touché à des substances plus fortes, et que cet homme à l’apparence de bon père de famille, qui emmenait parfois ses enfants sur les tournages lointains, était un tombeur. Pour ces deux raisons, sa première femme se séparera de lui.

Le format de 90 minutes n’évite pas les redites et les longueurs, ce qui impose parfois un tempo qui n’était pas celui de cet amateur pathologique de vitesse.

I Am Steve McQueen, de Jeff Renfroe (EU, 2014, 90 min).